Loteries : de véritables exploits

Don Bosco ne fut pas seulement un éducateur et un pasteur d’âmes infatigable, mais aussi un homme d’une extraordinaire ingéniosité, capable d’inventer des solutions nouvelles et courageuses pour soutenir ses œuvres. Les nécessités économiques de l’Oratoire de Valdocco, en constante expansion, le poussèrent à chercher des moyens toujours plus efficaces pour garantir le gîte, le couvert, l’école et le travail à des milliers de garçons. Parmi ceux-ci, les loteries représentèrent l’une des intuitions les plus ingénieuses : de véritables entreprises collectives, qui impliquaient nobles, prêtres, bienfaiteurs et simples citoyens. Ce n’était pas simple, car la législation piémontaise réglementait rigoureusement les loteries, n’en permettant l’organisation aux particuliers que dans des cas bien définis. Et il ne s’agissait pas seulement de collecter des fonds, mais de créer un réseau de solidarité qui unissait la société turinoise autour du projet éducatif et spirituel de l’Oratoire. La première, en 1851, fut une aventure mémorable, riche en imprévus et en succès.

L’argent qui arrivait entre les mains de Don Bosco y restait peu de temps, car il était immédiatement utilisé pour nourrir, loger, scolariser et faire travailler des dizaines de milliers de garçons ou pour construire des collèges, des orphelinats et des églises ou pour soutenir les missions d’Amérique du Sud. Ses comptes, on le sait, ont toujours été déficitaires ; les dettes l’ont accompagné tout au long de sa vie.
Or, parmi les moyens intelligemment adoptés par Don Bosco pour financer ses œuvres, on peut certainement placer les loteries : une quinzaine ont été organisées par lui, petites et grandes. La première, modeste, fut celle de Turin en 1851 en faveur de l’église Saint François de Sales de Valdocco et la dernière, grandiose, au milieu des années 1880, fut celle pour faire face aux immenses dépenses de l’église et de l’Hospice du Sacré-Cœur de la gare Termini à Rome.
Une véritable histoire de ces loteries reste à écrire, bien que les sources ne manquent pas à cet égard. Ce n’est que pour la première, celle de 1851, que nous avons retrouvé une douzaine d’inédits. Grâce à elles, nous reconstituons son histoire tourmentée en deux épisodes.

La demande d’autorisation
Selon la loi du 24 février 1820 – modifiée par les brevets royaux de janvier 1835 et par les instructions de la Compagnie générale des finances royales du 24 août 1835, puis par les brevets royaux du 17 juillet 1845 – toute loterie nationale (Royaume de Sardaigne) devait faire l’objet d’une autorisation gouvernementale préalable.
Pour Don Bosco, il s’agissait avant tout d’avoir la certitude morale de réussir le projet. Il l’a eue grâce au soutien économique et moral des tout premiers bienfaiteurs : les nobles familles Callori et Fassati et le chanoine Anglesio de Cottolengo. Il se lance donc dans ce qui s’avérera être une authentique entreprise. En peu de temps, il réussit à mettre en place une commission d’organisation, composée au départ de seize personnalités, puis de vingt. Parmi elles, de nombreuses autorités civiles officiellement reconnues, comme un sénateur (nommé trésorier), deux adjoints au maire, trois conseillers municipaux ; puis des prêtres prestigieux comme les théologiens Pietro Baricco, adjoint au maire et secrétaire de la Commission, Giovanni Borel, aumônier de la cour, Giuseppe Ortalda, directeur de l’Opera Pia di Propaganda Fide, Roberto Murialdo, cofondateur du Collegio degli Artigianelli et de l’Association de charité ; enfin, des hommes d’expérience comme un ingénieur, un orfèvre réputé, un négociant en gros, etc. Tous des gens, pour la plupart propriétaires terriens, connus de Don Bosco et « proches » de l’œuvre du Valdocco.
La Commission terminée, Don Bosco transmet, début décembre 1851, la demande formelle à l’Intendant Général des Finances, le Chevalier Alessandro Pernati di Momo (futur Sénateur et Ministre de l’Intérieur du Royaume) ainsi qu’à un « ami » de l’œuvre du Valdocco.

L’appel aux dons
Il joint à la demande d’autorisation une circulaire très intéressante dans laquelle, après avoir retracé l’histoire émouvante de l’Oratoire – apprécié par la famille royale, les autorités gouvernementales et communales – il signale que la nécessité constante d’agrandir l’Œuvre du Valdocco pour accueillir de plus en plus de jeunes consomme les ressources économiques de la bienfaisance privée. C’est pourquoi, pour payer les frais d’achèvement de la nouvelle chapelle en construction, il a été décidé de faire appel à la charité publique par le biais d’une loterie de dons à offrir spontanément : « Ce moyen consiste en une loterie d’objets, que le soussigné a eu l’idée d’entreprendre pour couvrir les frais d’achèvement de la nouvelle chapelle, et à laquelle votre seigneurie voudra sans doute prêter son concours, réfléchissant à l’excellence de l’œuvre à laquelle elle s’adresse. Quel que soit l’objet que Votre Seigneurie voudra offrir, qu’il soit de soie, de laine, de métal ou de bois, qu’il soit l’oeuvre d’un artiste réputé, d’un modeste ouvrier, d’un artisan laborieux ou d’une dame charitable, tout sera accepté avec reconnaissance, parce qu’en matière de charité, chaque petit secours est une grande chose, et parce que les offrandes, même petites, d’un grand nombre peuvent suffire à achever l’oeuvre désirée ».
La circulaire indiquait également les noms des promoteurs à qui les dons pouvaient être remis et des personnes de confiance qui les recueillaient et les gardaient. Les 46 promoteurs comprenaient diverses catégories de personnes : professionnels, professeurs, imprésarios, étudiants, clercs, commerçants, marchands, prêtres ; par contre, parmi les quelque 90 promoteurs, les femmes de la noblesse (baronne, marquise, comtesse et leurs accompagnatrices) semblaient prédominer.
Elle ne manqua pas de joindre à la demande le « plan de la loterie » dans ses multiples aspects formels : collecte des objets, récépissé de livraison des objets, leur évaluation, billets authentifiés à vendre en nombre proportionnel au nombre et à la valeur des objets, leur exposition au public, tirage au sort des gagnants, publication des numéros tirés, heure de la collecte des lots, etc. Une série de tâches exigeantes auxquelles Don Bosco ne s’est pas soustrait. La chapelle de Pinardi ne suffisait plus à ses jeunes : il leur faut une église plus grande, celle prévue de Saint François de Sales (une douzaine d’années plus tard, il leur en faudra une autre encore plus grande, celle de Marie Auxiliatrice !)

Une réponse positive
Compte tenu du sérieux de l’initiative et de la grande « qualité » des membres de la Commission de proposition, la réponse de l’Intendance ne pouvait être que positive et immédiate. Le 17 décembre, le député-maire Pietro Baricco a transmis à Don Bosco le décret correspondant, en l’invitant à transmettre des copies des futurs actes formels de la loterie à l’administration municipale, responsable de la régularité de toutes les exigences légales. A ce moment-là, avant Noël, Don Bosco envoya la circulaire susmentionnée à l’imprimerie, la fit circuler et commença à recueillir des dons.
Il disposait de deux mois pour le faire, car d’autres loteries avaient lieu au cours de l’année. Mais les dons arrivaient lentement et, à la mi-janvier, Don Bosco se vit contraint de réimprimer la circulaire et de demander la collaboration de tous les jeunes du Valdocco et de leurs amis pour écrire des adresses, rendre visite aux bienfaiteurs connus, faire connaître l’initiative et collecter les dons.
Mais le meilleur reste à venir.

La salle d’exposition
Le Valdocco n’ayant pas d’espace pour exposer les dons, Don Bosco demanda à l’adjoint au maire Baricco, trésorier de la commission de la loterie, de demander au ministère de la Guerre trois salles dans la partie du couvent Saint-Dominique mise à la disposition de l’armée. Les pères dominicains acceptaient. Le ministre Alfonso Lamarmora les leur accorda le 16 janvier. Mais Don Bosco se rendit vite compte qu’elles ne seraient pas assez grandes et demanda au roi, par l’intermédiaire de l’aumônier, l’abbé Stanislao Gazzelli, une chambre plus grande. Le surintendant royal Pamparà lui répondit que le roi ne disposait pas de locaux adéquats et proposa de louer à ses frais un local pour le jeu du Trincotto (ou pallacorda : une sorte de tennis à main ante litteram). Ce local ne serait cependant disponible que pour le mois de mars et sous certaines conditions. Don Bosco refusa la proposition mais accepta les 200 lires offertes par le roi pour la location du local. Il se mit alors à la recherche d’une autre salle et en trouva une convenable sur la recommandation de la mairie, derrière l’église Saint-Dominique, à quelques centaines de mètres du Valdocco.

Arrivée des dons
Entre-temps, Don Bosco avait demandé au ministre des Finances, le célèbre comte Camillo Cavour, une réduction ou une exonération des frais de port pour les lettres circulaires, les billets et les cadeaux eux-mêmes. Par l’intermédiaire du frère du comte, le très religieux marquis Gustavo di Cavour, il obtient l’approbation de diverses réductions postales.
Il s’agissait maintenant de trouver un expert pour évaluer le montant des cadeaux et le nombre de billets à vendre. Don Bosco s’adressa à l’intendant et lui proposa aussi le nom : un orfèvre membre de la Commission. L’intendant, cependant, répondit par l’intermédiaire du maire en lui demandant une double copie des cadeaux reçus afin de nommer son propre expert. Don Bosco exécuta immédiatement la demande et le 19 février, l’expert évalua les 700 objets collectés à 4124,20 lires. Au bout de trois mois, on arriva à 1000 dons, au bout de quatre mois à 2000, jusqu’à la conclusion de 3251 dons, grâce à la « quête » continue de Don Bosco auprès des particuliers, des prêtres et des évêques et à ses demandes formelles répétées à la Commune de prolonger le délai pour le tirage. Don Bosco ne manqua pas non plus de critiquer l’estimation faite par l’assesseur municipal des dons qui arrivaient continuellement, qu’il disait inférieure à leur valeur réelle ; et de fait, d’autres assesseurs s’ajoutèrent, en particulier un peintre pour les œuvres d’art.
Le chiffre final est tel que Don Bosco est autorisé à émettre 99.999 billets au prix de 50 centimes l’unité. Au catalogue déjà imprimé des dons numérotés avec le nom du donateur et des promoteurs, on ajouta un supplément avec les derniers dons arrivés. Parmi eux, ceux du Pape, du Roi, de la Reine Mère, de la Reine Consort, des députés, des sénateurs, des autorités municipales, mais aussi de nombreuses personnes modestes, surtout des femmes, qui ont offert des objets ménagers et mobiliers, même de faible valeur (verre, encrier, bougie, carafe, tire-bouchon, bouchon, dé à coudre, ciseaux, lampe, mètre, pipe, porte-clés, savon, taille-crayon, sucrier). Les cadeaux les plus fréquents sont les livres (629) et les tableaux (265). Même les garçons du Valdocco ont rivalisé pour offrir leur propre petit cadeau, peut-être un livret offert par Don Bosco lui-même.

Un travail énorme jusqu’au tirage au sort
À ce moment-là, il fallait imprimer les billets en série progressive sous deux formes (petit talon et billet), les faire signer par deux membres de la commission, envoyer le billet avec une note, documenter l’argent collecté. De nombreux bienfaiteurs ont reçu des dizaines de billets, avec une invitation à les conserver ou à les transmettre à des amis et connaissances.
La date du tirage au sort, initialement fixée au 30 avril, fut reportée au 31 mai, puis au 30 juin, pour se tenir à la mi-juillet. Ce dernier report est dû à l’explosion de la poudrière de Borgo Dora qui a dévasté la région du Valdocco.
Pendant deux après-midi, les 12 et 13 juillet 1852, des billets sont tirés au sort sur le balcon de l’hôtel de ville. Quatre urnes à roue de couleurs différentes contenaient 10 balles (de 0 à 9) identiques et de la même couleur que la roue. Introduites une à une par l’adjoint au maire dans les urnes, puis tournées, huit jeunes gens de l’Oratoire effectuent l’opération et le numéro tiré est proclamé à haute voix puis publié dans la presse. De nombreux cadeaux ont été déposés à l’Oratoire, où ils ont été réutilisés par la suite.

Le jeu en valait-il la chandelle ?
Pour les quelque 74 000 billets vendus, après déduction des frais, il reste à Don Bosco environ 26 000 lires, qu’il partage à parts égales avec l’œuvre voisine de Cottolengo. Un petit capital certes (la moitié du prix d’achat de la maison Pinardi l’année précédente), mais le plus grand résultat du travail exténuant qu’il effectua pour réaliser la loterie – documenté par des dizaines de lettres souvent inédites – fut l’implication directe et sincère de milliers de personnes de toutes les classes sociales dans son « projet naissant du Valdocco » : en le faisant connaître, apprécier et ensuite soutenir économiquement, socialement et politiquement.
Don Bosco a eu recours à plusieurs reprises à des loteries, toujours dans un double but : collecter des fonds pour ses œuvres en faveur des garçons pauvres, pour les missions, et offrir aux croyants (et aux non-croyants) des moyens de pratiquer la charité, le moyen le plus efficace, comme il le répétait continuellement, pour « obtenir le pardon des péchés et s’assurer la vie éternelle ».

« J’ai toujours eu besoin de tous » Don Bosco

Au sénateur Giuseppe Cotta

Giuseppe Cotta, banquier, était un grand bienfaiteur de Don Bosco. La déclaration suivante sur papier timbré, datée du 5 février 1849, est conservée dans les archives : « Les prêtres soussignés T. Borrelli Gioanni de Turin et D. Bosco Gio’ di Castelnuovo d’Asti se déclarent débiteurs de trois mille francs envers le malheureux Cavaliere Cotta qui les leur a prêtés pour une œuvre pieuse. Cette somme doit être remboursée par les soussignés dans un an avec les intérêts légaux ». Signé Prêtre Giovanni Borel, D. Bosco Gio.

Au bas de la même page et à la même date, don Joseph Cafasso écrit : « Le soussigné remercie vivement très Illustre Mr le Chev. Cotta pour ce qui précède et se porte garant auprès de lui pour la somme mentionnée ». Au bas de la page, Cotta signe qu’il a reçu 2 000 lires le 10 avril 1849, 500 lires le 21 juillet 1849 et le solde le 4 janvier 1851.




L’oratoire festif du Valdocco

En 1935, suite à la canonisation de Don Bosco en 1934, les Salésiens prirent soin de recueillir des témoignages à son sujet. Un certain Pietro Pons, qui avait fréquenté dans son enfance l’oratoire festif du Valdocco pendant une dizaine d’années (de 1871 à 1882), et qui avait également suivi deux années d’école primaire (avec des classes sous la Basilique de Marie Auxiliatrice), le 8 novembre, a donné un beau témoignage de ces années. Nous en extrayons quelques passages, presque tous inédits.

La figure de Don Bosco
Il était le centre d’attraction de tout l’Oratoire. Voici comment notre ancien oratorien Pietro Pons se souvient de lui à la fin des années 70 : « Il n’avait plus de vigueur, mais il était toujours calme et souriant. Il avait deux yeux qui perçaient et pénétraient l’esprit. Il apparaissait parmi nous : c’était une joie pour tout le monde. D. Rua, D. Lazzero étaient à ses côtés comme s’ils avaient le Seigneur au milieu d’eux. D. Barberis et tous les garçons couraient vers lui, l’entouraient, certains marchant sur le côté, d’autres derrière lui pour lui faire face. C’était une chance, un privilège convoité de pouvoir être près de lui, de lui parler. Il se promenait en parlant et en regardant tout le monde avec ces deux yeux qui tournaient dans tous les sens, électrisant les cœurs de joie ».
Parmi les épisodes qui lui sont restés en mémoire 60 ans plus tard, il en évoque deux en particulier : « Un jour… il est apparu seul devant la porte du sanctuaire. C’est alors qu’une bande de garçons se précipite pour l’écraser comme un coup de vent. Mais il tient à la main le parapluie, qui a un manche et une tige aussi épaisse que celle des paysans. Il le lève et, s’en servant comme d’une épée, jongle pour repousser cet assaut affectueux, tantôt à droite, tantôt à gauche, pour ouvrir le passage. Il touche l’un avec la pointe, l’autre sur le côté, mais entre-temps les autres s’approchent de l’autre côté. Le jeu, la plaisanterie se poursuit, réjouissant les cœurs, impatients de voir le bon Père revenir de son voyage. Il avait l’air d’un curé de village, mais d’un bon curé ».

Les jeux et le petit théâtre
Un oratoire salésien sans jeux est impensable. L’ancien élève âgé se souvient : « la cour était occupée par un bâtiment, l’église Maria A. et au bout d’un muret… une sorte de cabane reposait dans l’angle gauche, où il y avait toujours quelqu’un pour surveiller ceux qui entraient… Dès qu’on entrait à droite, il y avait une balançoire avec un seul siège, puis les barres parallèles et la barre fixe pour les plus grands, qui s’amusaient à faire des pirouettes et des sauts périlleux, et aussi le trapèze, et le simple tremplin, qui se trouvaient cependant près des sacristies, au-delà de la chapelle Saint-Joseph ». Et encore : « Cette cour était d’une belle longueur et se prêtait très bien à des courses de vitesse partant du côté de l’église et y revenant au retour. On y jouait aussi aux cercueils brisés, aux courses en sac et aux piñatas. Ces derniers jeux étaient annoncés dès le dimanche précédent. Il en était de même pour le mât de cocagne, mais l’arbre était planté avec la partie fine en bas pour qu’il soit plus difficile d’y monter. Il y avait des loteries, et le billet était payé un ou deux centimes. Dans la petite maison, il y avait une petite bibliothèque dans une armoire ».

Au jeu s’ajoutait le fameux « petit théâtre » sur lequel on jouait des drames authentiques comme « Le fils du croisé », on chantait les romances de Don Cagliero et on présentait des « comédies musicales » comme le Cordonnier incarné par le légendaire Carlo Gastini [brillant animateur des anciens élèves]. La pièce, à laquelle les parents assistaient gratuitement, se déroulait dans la salle située sous la nef de l’église Maria A., mais l’ancien oratoire rappelle également qu’ »une fois, elle a été jouée à la maison Moretta [l’actuelle église paroissiale située près de la place]. Les pauvres y vivaient dans la plus grande misère. Dans les caves que l’on aperçoit sous le balcon, il y avait une pauvre mère qui, à midi, portait sur ses épaules son Charles, dont le corps était raide à cause d’une maladie, pour qu’il prenne un bain de soleil ».

Offices religieux et réunions de formation
À l’oratoire festif, les offices religieux ne manquent pas le dimanche matin : messe avec communion, prières du bon chrétien ; l’après-midi, récréation, catéchisme et sermon de Don Giulio Barberis. D. Bosco n’est jamais venu dire la messe ou prêcher, mais seulement visiter et rester avec les garçons pendant la récréation… Les catéchistes et les assistants avaient leurs élèves avec eux dans l’église pendant les offices et leur enseignaient le catéchisme. La petite doctrine était donnée à tous. La leçon devait être apprise par cœur à chaque fête, ainsi que l’explication ». Les fêtes solennelles se terminaient par une procession et un goûter pour tous : « En sortant de l’église après la messe, il y avait un petit déjeuner. Un jeune homme à droite devant la porte donnait la miche de pain, un autre à gauche y mettait deux tranches de salami avec une fourchette ». Ces garçons se contentaient de peu, mais ils étaient ravis. Lorsque les garçons de l’intérieur se joignaient aux oratoriens pour chanter les vêpres, on pouvait entendre leurs voix dans la Rue Milano et la Rue Cours d’Appel !
Les réunions des groupes de formation se tenaient également à l’oratoire festif. Dans la petite maison près de l’église Saint-François, il y avait « une petite salle basse qui pouvait contenir une vingtaine de personnes… Dans la salle il y avait une petite table pour le conférencier, il y avait des bancs pour les réunions et les conférences des anciens en général, et de la Compagnie de Saint Louis, presque tous les dimanches ».

Qui étaient les Oratoriens ?
De ses quelque 200 compagnons – mais leur nombre diminuait en hiver en raison du retour des travailleurs saisonniers dans leurs familles – notre vieil homme plein d’entrain se souvient que beaucoup étaient originaires de Biella « presque tous « bic », c’est-à-dire qu’ils portaient le seau en bois plein de chaux et le panier en osier plein de briques aux maçons des bâtiments ». D’autres étaient « apprentis maçons, mécaniciens, ferblantiers ». Pauvres apprentis : ils travaillaient tous les jours du matin au soir et ce n’est que le dimanche qu’ils pouvaient s’offrir un peu de récréation « chez Don Bosco » (c’est ainsi que s’appelait son oratoire) : « Nous jouions à la mouche à âne, sous la direction de celui qui était alors M. Milanesio [futur prêtre qui fut un grand missionnaire en Patagonie]. M. Ponzano, devenu prêtre, était professeur de gymnastique. Il nous faisait faire des exercices libres, avec des bâtons, sur des appareils ».
Les souvenirs de Pietro Pons sont beaucoup plus vastes, aussi riches en suggestions lointaines qu’ils étaient imprégnés d’une ombre de nostalgie ; ils attendent d’être connus dans leur intégralité. Nous espérons le faire bientôt.




Maison Salésienne de Castel Gandolfo

Entre les vertes collines des Castelli Romani et les eaux tranquilles du lac Albano, se dresse un lieu où l’histoire, la nature et la spiritualité se rencontrent de manière singulière : Castel Gandolfo. Dans ce contexte riche en mémoire impériale, en foi chrétienne et en beauté paysagère, la présence salésienne représente un point d’ancrage d’accueil, de formation et de vie pastorale. La Maison Salésienne, avec son activité paroissiale, éducative et culturelle, poursuit la mission de saint Jean Bosco, offrant aux fidèles et aux visiteurs une expérience d’Église vivante et ouverte, immergée dans un environnement qui invite à la contemplation et à la fraternité. C’est une communauté qui, depuis près d’un siècle, marche au service de l’Évangile au cœur même de la tradition catholique.

Un lieu béni par l’histoire et la nature
Castel Gandolfo est un joyau des Castelli Romani, situé à environ 25 km de Rome, immergé dans la beauté naturelle des Collines d’Albano et surplombant le suggestif lac Albano. À environ 426 mètres d’altitude, ce lieu se distingue par son climat doux et accueillant, un microclimat qui semble préparé par la Providence pour accueillir ceux qui cherchent le repos, la beauté et le silence.

Déjà à l’époque romaine, ce territoire faisait partie de l’Albanum Caesaris, un ancien domaine impérial fréquenté par les empereurs depuis l’époque d’Auguste. Cependant, ce fut l’empereur Tibère qui, le premier, y résida de manière stable, tandis que plus tard Domitien y fit construire une splendide villa, dont les vestiges sont aujourd’hui visibles dans les jardins pontificaux. L’histoire chrétienne du lieu commence avec la donation de Constantin à l’Église d’Albano : un geste qui marque symboliquement le passage de la gloire impériale à la lumière de l’Évangile.

Le nom Castel Gandolfo dérive du latin Castrum Gandulphi, le château construit par la famille Gandolfi au XIIe siècle. Lorsque le château passa au Saint-Siège en 1596, il devint la résidence d’été des Pontifes, et le lien entre ce lieu et le ministère du Successeur de Pierre devint profond et durable.

La « Specola Vaticana » : contempler le ciel, louer le Créateur
L’observatoire astronomique du Vatican, fondé par le pape Léon XIII en 1891 et transféré dans les années 1930 à Castel Gandolfo en raison de la pollution lumineuse de Rome, revêt une importance spirituelle particulière. Elle témoigne de la manière dont la science, lorsqu’elle est orientée vers la vérité, conduit à louer le Créateur.
Au fil des ans, la Specola a contribué à des projets astronomiques majeurs tels que la Carte du Ciel et à la découverte de nombreux objets célestes.

Avec la détérioration continue des conditions d’observation, même dans les Castelli Romani, l’activité scientifique s’est principalement déplacée dans les années 1980 vers l’Observatoire du Mont Graham en Arizona (USA), où le Vatican Observatory Research Group poursuit ses recherches astrophysiques. Castel Gandolfo reste cependant un centre d’études important. Depuis 1986, il accueille tous les deux ans la Vatican Observatory Summer School, dédiée aux étudiants et diplômés en astronomie du monde entier. La Specola organise également des conférences spécialisées, des événements de vulgarisation, des expositions de météorites et des présentations de matériaux historiques et artistiques sur le thème astronomique, le tout dans un esprit de recherche, de dialogue et de contemplation du mystère de la création.

Une église au cœur de la ville et de la foi
Au XVIIe siècle, le pape Alexandre VII confia à Gian Lorenzo Bernini la construction d’une chapelle palatine pour les employés des Villas Pontificales. Le projet, initialement conçu en l’honneur de saint Nicolas de Bari, fut finalement dédié à saint Thomas de Villeneuve, religieux augustin canonisé en 1658. L’église fut consacrée en 1661 et confiée aux Augustins, qui la gérèrent jusqu’en 1929. Avec la signature des Accords du Latran, le pape Pie XI confia aux Augustins la charge pastorale de la nouvelle Paroisse Pontificale de Sant’Anna au Vatican, tandis que l’église de San Tommaso da Villanova fut ensuite confiée aux Salésiens.

La beauté architecturale de cette église, fruit du génie baroque, est au service de la foi et de la rencontre entre Dieu et l’homme. De nombreux mariages, baptêmes et liturgies y sont célébrés aujourd’hui, attirant des fidèles du monde entier.

La maison salésienne
Les Salésiens sont présents à Castel Gandolfo depuis 1929. À cette époque, le village connut un développement notable, tant démographique que touristique, également grâce au début des célébrations papales dans l’église Saint-Thomas-de-Villeneuve. Chaque année, lors de la solennité de l’Assomption, le pape célébrait la Sainte Messe dans la paroisse pontificale, une tradition initiée par saint Jean XXIII le 15 août 1959, lorsqu’il sortit à pied du Palais Pontifical pour célébrer l’Eucharistie parmi le peuple. Cette coutume s’est maintenue jusqu’au pontificat du pape François, qui a interrompu les séjours estivaux à Castel Gandolfo. En 2016, en effet, l’ensemble du complexe des Villas Pontificales a été transformé en musée et ouvert au public.

La maison salésienne a fait partie de l’Inspection Romaine et, de 2009 à 2021, de la Circonscription Salésienne Italie Centrale. Depuis 2021, elle est passée sous la responsabilité directe du Siège Central, avec un directeur et une communauté nommés par le Recteur Majeur. Actuellement, les salésiens présents proviennent de différentes nations (Brésil, Inde, Italie, Pologne) et sont actifs dans la paroisse, les aumôneries et l’oratoire.

Les espaces pastoraux, bien qu’appartenant à l’État de la Cité du Vatican et donc considérés comme des zones extraterritoriales, font partie du diocèse d’Albano- Les salésiens participent activement à la vie pastorale de ce diocèse. Ils sont impliqués dans la catéchèse diocésaine pour adultes, dans l’enseignement à l’école théologique diocésaine, et au Conseil Presbytéral en tant que représentants de la vie consacrée.

Outre la paroisse Saint-Thomas-de-Villeneuve, les Salésiens gèrent également deux autres églises : Marie-Auxiliatrice (également appelée « Saint-Paul », du nom du quartier) et Madone-du-Lac, voulue par saint Paul VI. Toutes deux furent construites entre les années 1960-1970 pour répondre aux besoins pastoraux d’une population en croissance.

L’église paroissiale conçue par Bernini est aujourd’hui la destination de nombreux mariages et baptêmes célébrés par des fidèles du monde entier. Chaque année, avec les autorisations nécessaires, des dizaines, parfois des centaines de célébrations y ont lieu.

Le curé est responsable de la communauté paroissiale, mais également aumônier des Villas Pontificales et il accompagne spirituellement les employés du Vatican qui y travaillent.

L’oratoire, actuellement géré par des laïcs, voit l’implication directe des Salésiens, notamment dans la catéchèse. Lors des week-ends, des fêtes et des activités estivales comme l’Estate Ragazzi, des étudiants salésiens résidant à Rome y collaborent également, offrant un précieux soutien. Près de l’église Marie-Auxiliatrice existe également un théâtre actif, avec des groupes paroissiaux qui organisent des spectacles, lieu de rencontre, de culture et d’évangélisation.

Vie pastorale et traditions
La vie pastorale est rythmée par les principales fêtes de l’année : saint Jean Bosco en janvier, Marie Auxiliatrice en mai avec une procession dans le quartier San Paolo, la fête de la Madonna del Lago – et donc la fête du Lac – le dernier samedi d’août, avec la statue portée en procession sur une barque sur le lac. Cette dernière célébration implique de plus en plus les communautés environnantes, attirant de nombreux participants, dont de nombreux motards, avec lesquels on a commené d’organiser des moments de rencontre.

Le premier samedi de septembre, la fête patronale de Castel Gandolfo est célébrée en l’honneur de saint Sébastien, avec une grande procession en ville. La dévotion à saint Sébastien remonte à 1867, lorsque la ville fut épargnée par une épidémie qui frappa durement les villages voisins. Bien que la mémoire liturgique tombe le 20 janvier, la fête locale est célébrée en septembre, à la fois en souvenir de la protection obtenue et pour des raisons climatiques et pratiques.

Le 8 septembre on célèbre le patron de l’église, saint Thomas de Villeneuve, coïncidant avec la Nativité de la Bienheureuse Vierge Marie. À cette occasion a également lieu la fête des familles, destinée aux couples qui se sont mariés dans l’église de Bernini : elles sont invitées à revenir pour une célébration communautaire, une procession et un moment convivial. L’initiative a eu d’excellents résultats et se consolide au fil du temps.

Une curiosité : la boîte aux lettres
À côté de l’entrée de la maison salésienne se trouve une boîte aux lettres, connue sous le nom de « Boîte des correspondances », considérée comme la plus ancienne encore en usage. Elle remonte en effet à 1820, vingt ans avant l’introduction du premier timbre au monde, le célèbre Penny Black (1840). C’est une boîte officielle des Postes Italiennes toujours active, mais aussi un symbole éloquent : une invitation à la communication, au dialogue, à l’ouverture du cœur. Le retour du pape Léon XIV à sa résidence d’été l’augmentera sûrement.

Castel Gandolfo reste un lieu où le Créateur parle à travers la beauté de la création, la Parole proclamée et le témoignage d’une communauté salésienne qui, dans la simplicité du style de Don Bosco, continue d’offrir accueil, formation, liturgie et fraternité, rappelant à ceux qui fréquentent ces lieux en quête de paix et de sérénité que la vraie paix et sérénité ne se trouvent qu’en Dieu et dans sa grâce.




Visite de la Basilique du Sacré-Cœur de Jésus à Rome (également en 3D)

La Basilique du Sacré-Cœur de Jésus à Rome est une église importante pour la ville. Elle est située dans le quartier Castro Pretorio, via Marsala, de l’autre côté de la gare Termini. Elle le siège d’une paroisse et aussi un titre cardinalice. À côté d’elle se trouve le Siège Central de la Congrégation Salésienne. Elle célèbre sa fête patronale précisément lors de la solennité du Sacré-Cœur. Sa position près de Termini en fait un point visible et reconnaissable pour ceux qui arrivent en ville. Sa statue dorée sur le clocher se dresse à l’horizon comme un symbole de bénédiction pour les résidents et les voyageurs.

Origines et histoire
L’idée de construire une église dédiée au Sacré-Cœur de Jésus remonte au pape Pie IX, qui, en 1870, posa la première pierre de l’édifice. Initialement voulue en l’honneur de saint Joseph, la nouvelle église fut dédiée par le pape dès 1871 au Sacré-Cœur de Jésus. Ce fut la deuxième grande église dédiée au Sacré-Cœur de Jésus après celle de Lisbonne, au Portugal, commencée en 1779 et consacrée en 1789, et avant le célèbre Sacré-Cœur de Montmartre, à Paris, en France, commencée en 1875 et consacrée en 1919.
Le chantier fut lancé dans des conditions difficiles. À la suite de l’annexion de Rome au Royaume d’Italie (1870), les travaux furent interrompus faute de fonds. Ce fut seulement grâce à l’intervention de saint Jean Bosco, sollicitée par le pape, que la construction put reprendre définitivement en 1880. Ce fut grâce à ses efforts et à ses sacrifices pour collecter des offrandes en Europe qu’il trouva les ressources nécessaires pour l’achèvement de l’édifice. L’architecte Francesco Vespignani, déjà « Architecte des Palais Sacrés » sous Léon XIII, mena le projet à terme. La consécration eut lieu le 14 mai 1887, scellant la fin de la première phase de construction.

Dès sa construction, l’église a assumé une fonction paroissiale. La paroisse du Sacré-Cœur de Jésus à Castro Pretorio fut instituée le 2 février 1879 par décret vicarial « Postremis hisce temporibus« . Par la suite, le pape Benoît XV l’éleva à la dignité de basilique mineure le 11 février 1921, par la lettre apostolique « Pia societas« . Plus récemment, le 5 février 1965, le pape Paul VI institua le titre cardinalice du Sacré-Cœur de Jésus à Castro Pretorio. Parmi les cardinaux titulaires, on peut rappeler Maximilien de Fürstenberg (1967-1988), Giovanni Saldarini (1991-2011) et Giuseppe Versaldi (de 2012 à aujourd’hui). Le titre cardinalice renforce le lien de la basilique avec la Curie papale et contribue à maintenir l’attention sur l’importance du culte au Sacré-Cœur et sur la spiritualité salésienne.

Architecture
La façade se présente en style néo-Renaissance, avec des lignes sobres et des proportions équilibrées, typiques de la reprise de la Renaissance dans l’architecture ecclésiastique de la fin du XIXe siècle. Le clocher, conçu dans le projet original de Vespignani, resta incomplet jusqu’en 1931, date à laquelle fut placée au sommet l’imposante statue dorée du Sacré-Cœur bénissant, don des anciens élèves des salésiens d’Argentine. Visible de loin, elle constitue un signe distinctif de la basilique et un symbole d’accueil pour ceux qui arrivent à Rome par la gare voisine.

L’intérieur suit un plan en forme de croix latine avec trois nefs, séparées par huit colonnes et deux piliers de granit gris qui soutiennent des arcs en plein cintre, et comprend un transept et une coupole centrale. La nef centrale et les nefs latérales sont couvertes d’un plafond à caissons, décorés dans le registre central. Les proportions intérieures sont harmonieuses : la largeur de la nef centrale d’environ 14 mètres et la longueur de 70 mètres créent un effet d’ampleur solennelle, tandis que les colonnes en granit, aux veines marquées, lui confèrent un caractère de solide majesté.
La coupole centrale, visible de l’intérieur avec ses fresques et ses caissons, attire la lumière naturelle à travers des fenêtres à la base et confère une verticalité à l’espace liturgique. Dans les chapelles latérales sont conservées des peintures de l’artiste romain Andrea Cherubini, qui a réalisé des scènes dévotionnelles en harmonie avec la dédicace au Sacré-Cœur.
Outre les peintures d’Andrea Cherubini, la basilique conserve diverses œuvres d’art sacré : statues en bois ou en marbre représentant la Vierge, les saints patrons de la Congrégation Salésienne et des figures charismatiques comme saint Jean Bosco.

Les séjours de saint Jean Bosco à Rome
Un élément de grande valeur historique et dévotionnelle est constitué par les Camerette (petites chambres) de Don Bosco à l’arrière de la basilique. C’est là que séjourna saint Jean Bosco neuf fois pendant ses vingt voyages à Rome. Initialement elles constituaient deux pièces séparées : bureau et chambre à coucher avec autel portatif. Elles furent ensuite unies pour accueillir pèlerins et groupes en prière, constituant un lieu de mémoire vivante de la présence du fondateur des Salésiens. Ici sont conservés des objets personnels et des reliques qui rappellent les miracles attribués au saint à cette période. Cet espace a été récemment rénové et continue d’attirer les pèlerins, stimulant des réflexions sur la spiritualité de Don Bosco et son dévouement aux jeunes.
La basilique et les bâtiments annexes sont la propriété de la Congrégation Salésienne, qui en a fait l’un des centres névralgiques de sa présence romaine. Déjà au temps de Don Bosco, le bâtiment à côté de l’église abritait la maison des Salésiens et devint par la suite le siège d’une école, d’un oratoire et de services pour les jeunes. Aujourd’hui, en plus des activités liturgiques, la structure accueille un travail significatif destiné aux migrants et aux jeunes en difficulté. Depuis 2017, le complexe est également le Siège Central du gouvernement de la Congrégation Salésienne.

Dévotion au Sacré-Cœur et célébrations liturgiques
La dédicace au Sacré-Cœur de Jésus se traduit par des pratiques dévotionnelles spécifiques. La fête liturgique du Sacré-Cœur, célébrée le vendredi suivant l’octave de la Fête-Dieu, est solennisée dans la basilique, avec des neuvaines, des célébrations eucharistiques, l’adoration eucharistique et une procession. La piété populaire autour du Sacré-Cœur – répandue surtout depuis le XIXe siècle avec l’approbation de la dévotion par Pie IX et Léon XIII – trouve en ce lieu un point de référence à Rome, attirant les fidèles pour des prières de réparation, de consécration et de remerciement.

Pour le Jubilé de 2025, la Basilique du Sacré-Cœur de Jésus a reçu le privilège de l’indulgence plénière, comme toutes les autres églises de l’Iter Europaeum.
Rappelons que pour célébrer le 50e anniversaire des relations diplomatiques entre l’Union Européenne et le Saint-Siège (1970-2020), un projet a été réalisé par la Délégation de l’Union Européenne auprès du Saint-Siège et les 28 Ambassades des États membres accréditées auprès du Saint-Siège. Ce projet consistait en un parcours liturgique et culturel où chaque pays indiquait une église ou une basilique de Rome à laquelle il est particulièrement lié pour des raisons historiques, artistiques ou de tradition d’accueil des pèlerins venant de ce pays. L’objectif principal était double : d’une part, favoriser la connaissance mutuelle entre citoyens européens et stimuler une réflexion sur les racines chrétiennes communes ; d’autre part, offrir aux pèlerins et visiteurs un instrument de découverte d’espaces religieux moins connus ou ayant une signification particulière, en faisant ressortir les connexions de l’Église avec l’ensemble de l’Europe. En élargissant la perspective, l’initiative a ensuite été reproposée dans le cadre des parcours jubilaires liés au Jubilé de Rome 2025, sous le nom latin « Iter Europaeum« , insérant cette étape dans le parcours officiel de la Ville Sainte.
L’Iter Europaeum prévoit des arrêts dans les 28 églises et basiliques de Rome, chacune « adoptée » par un État membre de l’Union Européenne. La Basilique du Sacré-Cœur de Jésus a été « adoptée » par le Luxembourg. Les églises de l’Iter Europaeum peuvent être vues ICI.

Visite de la Basilique
La Basilique peut être visitée physiquement, mais aussi virtuellement.

Pour une visite virtuelle en 3D, cliquez ICI.

Pour une visite virtuelle guidée, vous pouvez suivre les liens suivants :

1. Introduction
2. L’histoire
3. Façade
4. Clocher
5. Nef centrale
6. Mur intérieur de la façade
7. Sol
8. Colonnes
9. Murs de la nef centrale
10. Plafond 1
11. Plafond 2
12. Transept
13. Vitraux du transept
14. Autel principal
15. Chœur
16. Coupole
17. Chœur Don Bosco
18. Nefs latérales
19. Confessionnaux
20. Autels de la nef latérale droite
21. Fresques des nefs latérales
22. Coupoles de la nef gauche
23. Baptistère
24. Autels de la nef latérale gauche
25. Fresques des coupoles de la nef gauche
26. Sacristie
27. « Camerette » de Don Bosco (version précédente)
28. Musée Don Bosco (version précédente)

La Basilique du Sacré-Cœur de Jésus au Castro Pretorio est un exemple d’architecture néo-Renaissance liée à des événements historiques marqués par des crises et des renaissances. La combinaison d’éléments artistiques, architecturaux et historiques, comme les colonnes de granit aux décorations picturales, la célèbre statue sur le clocher et les Camerette de Don Bosco, fait de ce lieu une destination de pèlerinage spirituel et culturel. Sa situation près de la gare Termini en fait un signe d’accueil pour ceux qui arrivent à Rome, tandis que les activités pastorales destinées aux jeunes continuent d’incarner l’esprit de saint Jean Bosco : un cœur ouvert au service, à la formation et à la spiritualité incarnée. À visiter.




Le titre de Basilique au Temple du Sacré-Cœur à Rome

A l’occasion du centenaire de la mort de Don Paul Albera, on a souligné comment le deuxième successeur de Don Bosco a réalisé ce que l’on pourrait qualifier de rêve de Don Bosco. En effet, trente-quatre ans après la consécration du temple du Sacré-Cœur à Rome, qui eut lieu en présence de Don Bosco, désormais épuisé (mai 1887), le pape Benoît XVI – le pape de la célèbre et inouïe définition de la Première Guerre mondiale comme « massacre inutile » – conféra à l’église le titre de Basilique mineure (11 février 1921). Pour sa construction, Don Bosco avait « donné son âme » (et son corps aussi !) au cours des sept dernières années de sa vie. Il avait fait de même au cours des vingt années précédentes (1865-1868) pour la construction de l’église Marie Auxiliatrice de Turin-Valdocco, la première église salésienne élevée à la dignité de basilique mineure le 28 juin 1911, en présence du nouveau Recteur Majeur, le Père Paul Albera.

Le résultat de la supplication
Mais comment en est-on arrivé là ? Qui en est à l’origine ? Nous le savons désormais avec certitude grâce à la découverte récente du brouillon dactylographié de la demande de ce titre par le Recteur Majeur, le Père Paolo Albera. Il est inclus dans un livret commémorant le 25e anniversaire du Sacré-Cœur, édité en 1905 par le directeur de l’époque, le père Francesco Tomasetti (1868-1953). Le tapuscrit, daté du 17 janvier 1921, comporte des corrections minimes de la part du Recteur Majeur mais, ce qui est important, porte sa signature autographe.
Après une description de l’œuvre de Don Bosco et de l’activité incessante de la paroisse, probablement tirée de l’ancien dossier, le Père Albera s’adresse au Pape en ces termes

« Alors que la dévotion au Sacré-Cœur de Jésus grandit et se répand dans le monde entier, et que de nouveaux Temples sont dédiés au Divin Cœur, également grâce à la noble initiative des Salésiens, comme à S. Paolo au Brésil, à La Plata en Argentine, à Londres, à Barcelone et ailleurs, il semble que le premier Temple-Sanctuaire dédié au Sacré-Cœur de Jésus à Rome, où une dévotion aussi importante a une affirmation si digne de la Ville Éternelle, mérite une distinction spéciale. C’est pourquoi le soussigné, après avoir entendu l’avis du Conseil supérieur de la pieuse Société salésienne, prie humblement Votre Sainteté de daigner accorder au Temple-Sanctuaire du Sacré-Cœur de Jésus au Castro Pretorio à Rome le titre et les privilèges de Basilique mineure, espérant que cette honorable élévation augmentera la dévotion, la piété et toute activité catholique bénéfique ».

La supplique, en belle copie, signée par le père Albera, fut vraisemblablement envoyée par le procureur, le père Francesco Tomasetti, à la Sacrée Congrégation des Brefs, qui l’accueillit favorablement. Il s’empressa de rédiger le projet de Bref apostolique à conserver dans les Archives du Vatican, le fit transcrire par des calligraphes experts sur un riche parchemin et le transmit à la Secrétairie d’État pour la signature du titulaire du moment, le cardinal Pietro Gasparri.
Aujourd’hui, les fidèles peuvent admirer cet original de l’octroi du titre demandé, joliment encadré dans la sacristie de la basilique (voir photo).
Nous ne pouvons qu’être reconnaissants à la Dr Patrizia Buccino, spécialiste en archéologie et en histoire, et au père Giorgio Rossi, historien salésien, qui ont diffusé la nouvelle. C’est à eux qu’il revient de compléter l’enquête entamée en recherchant dans les archives du Vatican l’intégralité de la correspondance, qui sera également portée à la connaissance du monde scientifique par le biais de la célèbre revue d’histoire salésienne « Ricerche Storiche Salesiane ».

Le Sacré-Cœur : une basilique nationale au rayonnement international
Vingt-six ans auparavant, le 16 juillet 1885, à la demande de Don Bosco et avec le consentement explicite du Pape Léon XIII, Monseigneur Gaetano Alimonda, archevêque de Turin, avait chaleureusement exhorté les Italiens à participer au succès de la « noble et sainte proposition [du nouveau temple] en la qualifiant de vote national des Italiens ».
Or, le Père Albera, dans sa demande au pontife, après avoir rappelé l’appel pressant du Cardinal Alimonda, rappelle que toutes les nations du monde ont été invitées à contribuer économiquement à la construction, à la décoration du temple et des œuvres annexes (y compris l’inévitable oratoire salésien avec hospice !) afin que le Temple-Sanctuaire, en plus d’un vœu national, devienne une « manifestation mondiale ou internationale de la dévotion au Sacré-Cœur ».
À cet égard, dans un article historico-ascétique publié à l’occasion du premier centenaire de la consécration de la basilique (1987), l’érudit Armando Pedrini l’a définie comme : « Un temple qui est donc international en raison de la catholicité et de l’universalité de son message à tous les peuples », compte tenu également de la « position proéminente » de la basilique à côté de la gare ferroviaire dont l’internationalité est reconnue.
Rome-Termini n’est donc pas seulement une grande gare avec des problèmes d’ordre public et un territoire difficile à gérer, dont on parle souvent dans les journaux et comme les gares de nombreuses capitales européennes. Mais c’est aussi la Basilique du Sacré-Cœur de Jésus. Et si le soir et la nuit, la zone n’apporte pas la sécurité aux touristes, pendant la journée, la Basilique distribue la paix et la sérénité aux fidèles qui y entrent, s’y arrêtent pour prier, y reçoivent les sacrements.
Les pèlerins qui passeront par la gare de Termini dans une année sainte pas trop lointaine (2025) s’en souviendront-ils ? Ils n’auront qu’à traverser une rue… et le Sacré-Cœur de Jésus les attend.

PS. À Rome, il existe une deuxième basilique paroissiale salésienne, plus grande et plus riche sur le plan artistique que celle du Sacré-Cœur : il s’agit de celle de Saint Jean Bosco à Tuscolano, qui est devenue telle en 1965, quelques années après son inauguration (1959). Où se trouve-t-elle ? Évidemment dans le quartier Don Bosco (à deux pas des célèbres studios de Cinecittà). Si la statue du clocher de la basilique du Sacré-Cœur domine la place de la gare Termini, la coupole de la basilique de Don Bosco, légèrement inférieure à celle de Saint-Pierre, la regarde en revanche de face, bien que depuis deux points extrêmes de la capitale. Et comme il n’y a pas deux sans trois, il y a une troisième splendide basilique paroissiale salésienne à Rome : celle de Santa Maria Ausiliatrice, dans le quartier Appio-Tuscolano, à côté du grand Institut Pio XI.

Lettre apostolique intitulée Pia Societas, datée du 11 février 2021, par laquelle Sa Sainteté Benoît XV a élevé l’église du Sacré-Cœur de Jésus au rang de Basilique.

Ecclesia parochialis SS.mi Cordis Iesu ad Castrum Praetorium in urbe titulo et privilegiis Basilicae Minoris decoratur.
Benedictus pp. XV

            Ad perpetuam rei memoriam.
            Pia Societas sancti Francisci Salesii, a venerabili Servo Dei Ioanne Bosco iam Augustae Taurinorum condita atque hodie per dissitas quoque orbis regiones diffusa, omnibus plane cognitum est quanta sibi merita comparaverit non modo incumbendo actuose sollerterque in puerorum, orbitate laborantium, religiosam honestamque institutionem, verum etiam in rei catholicae profectum tum apud christianum populum, tum apud infideles in longinquis et asperrimis Missionibus. Eiusdem Societatis sodalibus est quoque in hac Alma Urbe Nostra ecclesia paroecialis Sacratissimo Cordi Iesu dicata, in qua, etsi non abhinc multos annos condita, eximii praesertim Praedecessoris Nostri Leonis PP. XIII iussu atque auspiciis, christifideles urbani, eorumdem Sodalium opera, adeo ad Dei cultum et virtutum laudem exercentur, ut ea vel cum antiquioribus paroeciis in honoris ac meritorum contentionem veniat. Ipsemet Salesianorum Sodalium fundator, venerabilis Ioannes Bosco, in nova Urbis regione, aere saluberrimo populoque confertissima, quae ad Gastrum Praetorium exstat, exaedificationem inchoavit istius templi, et, quasi illud erigeret ex gentis italicae voto et pietatis testimonio erga Sacratissimum Cor Iesu, stipem praecipue ex Italiae christifidelibus studiose conlegit; verumtamen pii homines ex ceteris nationibus non defuerunt, qui, in exstruendum perficiendumque templum istud, erga Ssmum Cor Iesu amore incensi, largam pecuniae vim contulerint. Anno autem MDCCCLXXXVII sacra ipsa aedes, secundum speciosam formam a Virginio Vespignani architecto delineatam, tandem perfecta ac sollemniter consecrata dedicataque est. Eamdem vero postea, magna cum sollertia, Sodales Salesianos non modo variis altaribus, imaginibus affabre depictis et statuis, omnique sacro cultui necessaria supellectili exornasse, verum etiam continentibus aedificiis iuventuti, ut tempora nostra postulant, rite instituendae ditasse, iure ac merito Praedecessores Nostri sunt » laetati, et Nos haud minore animi voluptate probamus. Quapropter cum dilectus filius Paulus Albera, hodiernus Piae Societatis sancti Francisci Salesii rector maior, nomine proprio ac religiosorum virorum quibus praeest, quo memorati templi Ssmi Cordi Iesu dicati maxime augeatur decus, eiusdem urbanae paroeciae fidelium fides et pietas foveatur, Nos supplex rogaverit, ut eidem templo dignitatem, titulum et privilegia Basilicae Minoris pro Nostra benignitate impertiri dignemur; Nos, ut magis magisque stimulos fidelibus ipsius paroeciae atque Urbis totius Nostrae ad Sacratissimum Cor Iesu impensius colendum atque adamandum addamus, nec non benevolentiam, qua Sodales Salesianos ob merita sua prosequimur, publice significemus, votis hisce piis annuendum ultro libenterque censemus. Quam ob rem, conlatis consiliis cum VV. FF. NN. S. R. E. Cardinalibus Congregationi Ss. Rituum praepositis, Motu proprio ac de certa scientia et matura deliberatione Nostris, deque apostolicae potestatis plenitudine, praesentium Litterarum tenore perpetuumque in modum, enunciatum templum Sacratissimo Cordi Iesu dicatum, in hac alma Urbe Nostra atque ad Castrum Praetorium situm, dignitate ac titulo Basilicae Minoris honestamus, cum omnibus et singulis honoribus, praerogativis, privilegiis, indultis quae aliis Minoribus Almae huius Urbis Basilicis de iure competunt. Decernentes praesentes Litteras firmas, validas atque efficaces semper exstare ac permanere, suosque integros effectus sortiri iugiter et obtinere, illisque ad quos pertinent nunc et in posterum plenissime suffragari; sicque rite iudicandum esse ac definiendum, irritumque ex nunc et inane fieri, si quidquam secus super his, a quovis, auctoritate qualibet, scienter sive ignoranter attentari contigerit. Non obstantibus contrariis quibuslibet.

            Datum Romae apud sanctum Petrum sub annulo Piscatoris, die XI februarii MCMXXI, Pontificatus Nostri anno septimo.
P. CARD. GASPARRI, a Secretis Status.

***

L’église paroissiale du Sacré-Cœur de Jésus, située près du Castrum Praetorium dans la ville, est honorée du titre et des privilèges de Basilique Mineure.
Benoît XV

Pour la mémoire éternelle de cette chose.
La Pieuse Société de Saint François de Sales, fondée par le vénérable Serviteur de Dieu Jean Bosco à Turin et aujourd’hui répandue dans les régions les plus éloignées du monde, a acquis des mérites reconnus de tous, non seulement en s’engageant activement et habilement dans l’éducation religieuse et honnête des enfants orphelins, mais aussi dans le progrès de la cause catholique, tant parmi le peuple chrétien que parmi les infidèles dans les Missions lointaines et très difficiles. Les membres de cette même Société possèdent également dans cette Ville Éternelle Notre église paroissiale dédiée au Sacré-Cœur de Jésus, dans laquelle, bien que fondée il n’y a pas si longtemps, sur l’ordre et sous les auspices de Notre éminent Prédécesseur le Pape Léon XIII, les fidèles urbains, grâce à l’œuvre de ces mêmes membres, sont tellement exercés au culte de Dieu et à la louange des vertus, qu’elle rivalise même avec les paroisses plus anciennes en termes d’honneur et de mérites. Le fondateur lui-même des Salésiens, le vénérable Jean Bosco, a commencé la construction de ce temple dans un nouveau quartier de la Ville, à l’air très sain et très peuplé, situé près du Castrum Praetorium, et, comme s’il l’érigeait selon le vœu du peuple italien et comme témoignage de piété envers le Sacré-Cœur de Jésus, il a recueilli avec zèle des aumônes principalement auprès des fidèles d’Italie ; cependant, des personnes pieuses d’autres nations n’ont pas manqué, qui, enflammées par l’amour envers le Sacré-Cœur de Jésus, ont contribué une somme d’argent considérable à la construction et à l’achèvement de ce temple. En l’an 1887, ce même édifice sacré, selon la belle forme dessinée par l’architecte Virginio Vespignani, fut enfin achevé et solennellement consacré et dédié. Nos Prédécesseurs se sont réjouis à juste titre et à bon droit de ce que les Salésiens aient ensuite, avec une grande habileté, non seulement orné ce même édifice de divers autels, d’images habilement peintes et de statues, et de tout le mobilier nécessaire au culte sacré, mais aussi qu’ils l’aient enrichi de bâtiments contigus pour l’éducation de la jeunesse, comme l’exigent nos temps, et Nous approuvons cela avec non moins de joie. C’est pourquoi, puisque notre cher fils Paul Albera, actuel recteur majeur de la Pieuse Société de Saint François de Sales, en son nom propre et au nom des religieux qu’il dirige, afin d’accroître au maximum la splendeur du temple susmentionné dédié au Sacré-Cœur de Jésus, et de favoriser la foi et la piété des fidèles de cette même paroisse urbaine, Nous a humblement demandé de daigner accorder à ce même temple la dignité, le titre et les privilèges de Basilique Mineure par Notre bienveillance ; Nous, afin d’inciter de plus en plus les fidèles de cette paroisse et de toute Notre Ville à cultiver et à aimer plus intensément le Sacré-Cœur de Jésus, et aussi pour manifester publiquement la bienveillance que Nous portons aux Salésiens en raison de leurs mérites, Nous estimons qu’il faut accéder volontiers et de bon gré à ces pieux vœux. C’est pourquoi, après avoir consulté Nos Vénérables Frères les Cardinaux de la Sainte Église Romaine préposés à la Congrégation des Sacrés Rites, de Notre propre Motu proprio et de Notre science certaine et mûre délibération, et en vertu de la plénitude de la puissance apostolique, par la teneur des présentes Lettres et de manière perpétuelle, Nous honorons le temple susmentionné dédié au Sacré-Cœur de Jésus, situé dans cette Ville Éternelle et près du Castrum Praetorium, de la dignité et du titre de Basilique Mineure, avec tous et chacun des honneurs, prérogatives, privilèges, indults qui reviennent de droit aux autres Basiliques Mineures de cette Ville Éternelle. Nous décrétons que les présentes Lettres sont et demeurent toujours fermes, valides et efficaces, qu’elles produisent et obtiennent toujours leurs pleins effets, et qu’elles profitent pleinement à ceux qu’elles concernent maintenant et à l’avenir ; et qu’il doit en être ainsi jugé et défini, et que tout ce qui serait tenté autrement à ce sujet, par quiconque, sous quelque autorité que ce soit, sciemment ou par ignorance, est nul et non avenu dès maintenant. Nonobstant toute disposition contraire.

Donné à Rome, près de Saint-Pierre, sous l’anneau du Pêcheur, le 11 février 1921, la septième année de Notre Pontificat.
P. CARD. GASPARRI, Secrétaire d’État.




Don Pietro Ricaldone renaît à Mirabello Monferrato

Don Pietro Ricaldone (Mirabello Monferrato, 27 avril 1870 – Rome, 25 novembre 1951) fut le quatrième successeur de Don Bosco à la tête des Salésiens, un homme d’une vaste culture, d’une profonde spiritualité et d’un grand amour pour les jeunes. Né et élevé au milieu des collines du Monferrat, il porta toujours en lui l’esprit de cette terre, le traduisant dans un engagement pastoral et éducatif qui allait faire de lui une figure d’envergure internationale. Aujourd’hui, les habitants de Mirabello Monferrato souhaitent le faire revivre dans sa patrie.

Le Comité Don Pietro Ricaldone : renaissance d’un héritage (2019)
En 2019, un groupe d’anciens et anciennes élèves, d’historiens et de passionnés des traditions locales a créé le Comité Don Pietro Ricaldone à Mirabello Monferrato. L’objectif – simple et ambitieux à la fois – a été dès le début de replacer la figure de Don Pietro au cœur du village et des jeunes, afin que son histoire et son héritage spirituel ne se perdent pas.

Pour préparer le 150e anniversaire de sa naissance (1870–2020), le Comité a exploré les Archives Historiques Municipales de Mirabello et les Archives Historiques Salésiennes, découvrant des lettres, des notes et d’anciens volumes. De ce travail est née une biographie illustrée, conçue pour les lecteurs de tous âges, où la personnalité de Ricaldone se révèle de manière claire et captivante. La collaboration avec Don Egidio Deiana, spécialiste de l’histoire salésienne, a été fondamentale durant cette phase.

En 2020, une série d’événements était prévue – expositions photographiques, concerts, spectacles de théâtre et de cirque – tous centrés sur la mémoire de Don Pietro. Bien que la pandémie ait obligé à reprogrammer une grande partie des festivités, un événement commémoratif a eu lieu en juillet de la même année, comprenant une exposition photographique sur les étapes de la vie de Ricaldone, une animation pour enfants avec des ateliers créatifs et une célébration solennelle, en présence de quelques Supérieurs Salésiens.
Cette rencontre a marqué le début d’une nouvelle saison d’attention portée à la commune de Mirabello.

Au-delà du 150e : le concert pour le 70e anniversaire de sa mort
L’enthousiasme suscité par la redécouverte de la figure de Don Pietro Ricaldone a conduit le Comité à prolonger ses activités au-delà du 150e anniversaire.
En vue du 70e anniversaire de sa mort (25 novembre 1951), le Comité a organisé un concert intitulé « Hâter l’aube radieuse du jour tant désiré », une phrase tirée de la circulaire de Don Pietro sur le Chant Grégorien de 1942.
En pleine Seconde Guerre mondiale, Don Pietro – alors Recteur Majeur – écrivit une célèbre circulaire sur le Chant Grégorien dans laquelle il soulignait l’importance de la musique comme voie privilégiée pour ramener les cœurs des hommes à la charité, à la douceur et surtout à Dieu : « D’aucuns s’étonneront peut-être que, dans un tel fracas d’armes, je vous invite à vous occuper de musique. Pourtant, je pense que même sans avoir recours à la mythologie, ce thème répond pleinement aux exigences de l’heure présente. Tout ce qui peut exercer une influence éducative et ramener les hommes aux sentiments de charité et de douceur, et surtout à Dieu, doit être pratiqué par nous, avec diligence et sans délai, pour hâter l’aube radieuse du jour tant désiré ».

Promenades et racines salésiennes : la « Promenade de Don Bosco »
Bien qu’initialement conçu comme un hommage à Don Ricaldone, le Comité a fini par promouvoir à nouveau la figure de Don Bosco et toute la tradition salésienne, dont Don Pietro fut l’héritier et le protagoniste.
Depuis 2021, chaque deuxième dimanche d’octobre, le Comité organise la « Promenade de Don Bosco » en proposant le pèlerinage que Don Bosco effectua avec les jeunes de Mirabello à Lu Monferrato du 12 au 17 octobre 1861. Durant ces cinq jours, on mit au point les détails du premier collège salésien hors de Turin, confié au Bienheureux Michel Rua avec Don Albera parmi les enseignants. Même si l’initiative ne concerne pas directement Don Pietro, elle souligne ses racines et son lien avec la tradition salésienne locale qu’il a lui-même promue.

Hospitalité et échanges culturels
Le Comité a favorisé l’accueil de groupes de jeunes, d’écoles professionnelles et de salésiens du monde entier. Certaines familles offrent l’hospitalité gratuitement, renouvelant ainsi la fraternité typique de Don Bosco et de Don Pietro. En 2023, un groupe nombreux de la Crocetta a fait étape à Mirabello, tandis que chaque été arrivent des groupes internationaux accompagnés par Don Egidio Deiana. Chaque visite est un dialogue entre mémoire historique et joie des jeunes.

Le 30 mars 2025, près de cent capitulaires salésiens ont fait étape à Mirabello, sur les lieux où Don Bosco ouvrit son premier collège hors de Turin et où Don Pietro vécut ses années de formation. Le Comité, en collaboration avec la Paroisse et l’Office de Tourisme Pro Loco, a organisé l’accueil et réalisé une vidéo de vulgarisation sur l’histoire salésienne locale, appréciée par tous les participants.
Les initiatives se poursuivent et aujourd’hui, le Comité, sous la conduite de son président, collabore à la création du Chemin de Don Bosco dans le Montferrat, un itinéraire spirituel d’environ 200 km empruntant les routes automnales parcourues par le Saint. L’objectif est d’obtenir la reconnaissance officielle au niveau régional, mais aussi d’offrir aux pèlerins une expérience de formation et d’évangélisation. Les promenades des jeunes de Don Bosco étaient en effet des expériences de formation et d’évangélisation. C’est ce même esprit que Don Pietro Ricaldone a défendu et promu par la suite tout au long de son rectorat.

La mission du Comité : maintenir vivante la mémoire de Don Pietro
Derrière chaque initiative se trouve la volonté de mettre en lumière l’œuvre éducative, pastorale et culturelle de Don Pietro Ricaldone. Les fondateurs du Comité conservent des souvenirs personnels d’enfance et désirent transmettre aux nouvelles générations les valeurs de foi, de culture et de solidarité qui animaient le prêtre de Mirabello. À une époque où de nombreux repères vacillent, redécouvrir le parcours de Don Pietro signifie offrir un modèle de vie capable d’éclairer le présent : « Là où passent les Saints, Dieu marche avec eux et rien n’est plus comme avant » (Saint Jean-Paul II).
Le Comité Don Pietro Ricaldone se fait le porte-parole de cet héritage. Il espère que la mémoire d’un grand fils de Mirabello continuera d’éclairer le chemin pour les générations futures, traçant une voie sûre faite de foi, de culture et de solidarité.




Le nouveau Siège Central des Salésiens. Rome, Sacré-Cœur

Aujourd’hui, la vocation originelle de la maison du Sacré-Cœur connaît un nouveau départ. Tradition et innovation continuent de caractériser le passé, le présent et l’avenir de cette œuvre si significative.

            Que de fois Don Bosco a souhaité venir à Rome pour ouvrir une maison salésienne ! Dès son premier voyage en 1858, son objectif était d’être présent dans la Ville Éternelle avec une présence éducative. Il est venu à Rome une vingtaine de fois et ce n’est que lors de son dernier voyage en 1887 qu’il réussit à réaliser son rêve en ouvrant la maison du Sacré-Cœur à Castro Pretorio.
            L’œuvre salésienne est située dans le quartier de l’Esquilin, né en 1875, après la brèche de Porta Pia et à cause de la nécessité du Royaume d’Italie de construire les ministères dans la nouvelle capitale. Le quartier, également appelé Umbertino, est d’architecture piémontaise, toutes les rues portent le nom de batailles ou d’événements liés au nouvel État. Dans ce quartier, qui rappelle Turin, ne pouvait manquer une église, qui soit aussi une paroisse, construit par un Piémontais, Don Giovanni Bosco. Le nom de l’église n’a pas été choisi par Don Bosco, mais par la volonté de Léon XIII, désireux de relancer une dévotion, plus que jamais actuelle, au Cœur de Jésus.
            Aujourd’hui, la maison du Sacré-Cœur est entièrement rénovée pour répondre aux besoins du Siège Central des Salésiens. Depuis sa fondation jusqu’à nos jours, la maison a subi plusieurs transformations. L’œuvre est née comme paroisse et comme sanctuaire international pour la diffusion de la dévotion au Sacré-Cœur, mais dès le début l’objectif déclaré par Don Bosco était de construire à côté une maison pour accueillir jusqu’à 500 jeunes pauvres. Don Rua mène l’œuvre à son terme et ouvre des ateliers pour artisans (école d’arts et métiers). Dans les années suivantes, le collège et le lycée classique voient le jour. Pendant quelques années, elle a également été le siège de l’université (Athénée pontifical salésien) et une maison de formation pour les salésiens qui étudiaient dans les universités romaines tout en s’impliquant dans l’école et dans l’oratoire (parmi ces étudiants, on compte également Don Quadrio). Elle a également été le siège de la province romaine d’abord, puis de la Circonscription de l’Italie Centrale à partir de 2008. Depuis 2017, en raison du déménagement de Via della Pisana, elle est devenue le Siège Central des Salésiens. La restructuration a commencé en 2022 pour adapter les locaux à sa fonction de maison du Recteur Majeur. Dans cette maison ont vécu ou sont passés Don Bosco, Don Rua, le cardinal Cagliero (son appartement était situé au premier étage de Via Marsala), Zeffirino Namuncurà, Mgr Versiglia, Artemide Zatti, tous les Recteurs Majeurs successeurs de Don Bosco, Saint Jean-Paul II, Sainte Thérèse de Calcutta, le pape François. Parmi les directeurs de la maison, il faut signaler Mgr Giuseppe Cognata ; c’est sous sa direction, en 1930, que la statue du Sacré-Cœur a été installée sur le clocher.
            Grâce au Sacré-Cœur, le charisme salésien s’est répandu dans différents quartiers de Rome. De fait, toutes les autres présences salésiennes de Rome ont été une ramification de cette maison : le Testaccio, l’Institut Pie XI, le Borgo Ragazzi Don Bosco, Don Bosco Cinecittà, Gerini, l’Université Pontificale Salésienne.

Carrefour d’accueil
            Les deux traits déterminants de la Maison du Sacré-Cœur sont, depuis le début :
            1) la catholicité. Ouvrir une maison à Rome a toujours signifié pour les fondateurs des ordres religieux une proximité avec le Pape et un élargissement des horizons au niveau universel. Lors de la première conférence aux coopérateurs salésiens au monastère Tor De’ Specchi à Rome en 1874, Don Bosco avait affirmé que les salésiens se répandraient dans le monde entier et qu’aider leurs œuvres signifiait vivre l’esprit catholique le plus authentique.
            2) l’attention aux jeunes pauvres. L’œuvre est située près de la gare, carrefour d’arrivées et de départs, lieu où se sont toujours retrouvés les plus pauvres. Cela est inscrit dans l’histoire du Sacré-Cœur.
            Au début, la maison accueillait les jeunes pauvres pour leur enseigner un métier, puis l’oratoire a accueilli les jeunes du quartier. Après la guerre, la maison a recueilli et soigné les sciuscià (garçons qui ciraient les chaussures des personnes qui sortaient de la gare), puis on les a transférés au Borgo Ragazzi Don Bosco. Au milieu des années 1980, lors de la première immigration en Italie, des jeunes immigrés ont été accueillis en collaboration avec la Caritas naissante. Dans les années 1990, un centre recevait de jour des jeunes en alternative à la prison et leur enseignait les rudiments de la lecture et de l’écriture et un métier. Depuis 2009, un projet d’intégration entre jeunes réfugiés et jeunes italiens a permis de nombreuses initiatives d’accueil et d’évangélisation. La Maison du Sacré-Cœur a également été le siège du Centre National des Œuvres Salésiennes d’Italie pendant environ 30 ans.

Le nouveau départ
            Aujourd’hui, la vocation originelle de la maison du Sacré-Cœur connaît un nouveau départ. Tradition et innovation continuent de caractériser le passé, le présent et l’avenir de cette œuvre si significative.
            Tout d’abord, la catholicité continue de se vivre grâce à la présence du Recteur Majeur avec son conseil et des confrères qui s’occupent de la dimension mondiale. Une vocation à l’accueil de nombreux salésiens qui viennent du monde entier et trouvent au Sacré-Cœur un lieu pour se sentir chez eux, expérimenter la fraternité, rencontrer le successeur de Don Bosco. En même temps, c’est le lieu d’où le Recteur Majeur anime et gouverne la Congrégation en traçant les lignes pour être fidèles à Don Bosco aujourd’hui.
            Ensuite, la présence d’un lieu salésien significatif où Don Bosco a écrit la lettre de Rome et a compris le rêve des neuf ans. À l’intérieur de la maison se trouvera le Musée de la Maison de Don Bosco à Rome qui, sur trois étages, racontera la présence du Saint dans la ville éternelle. La centralité de l’éducation comme « affaire de cœur » dans son Système Préventif, la relation avec les Papes qui ont aimé Don Bosco et que lui le premier a aimé et servi, le Sacré-Cœur comme lieu d’expansion du charisme dans le monde entier, le parcours difficile d’approbation des Constitutions, la compréhension du rêve des neuf ans et son dernier souffle éducatif en écrivant la lettre de Rome : tels sont les thèmes principaux qui, sous une forme multimédia immersive, seront racontés à ceux qui visiteront l’espace muséal.
            Troisièmement, la dévotion au Sacré-Cœur représente le centre du charisme. Avant même de recevoir l’invitation à construire l’église du Sacré-Cœur, Don Bosco avait orienté les jeunes vers cette dévotion. Dans le Giovane provveduto, on trouve déjà des prières et des pratiques de piété adressées au Cœur du Christ. Mais avec l’acceptation de la proposition de Léon XIII, il devient un véritable apôtre du Sacré-Cœur. Il n’épargne pas ses forces pour chercher des fonds pour l’église. Le soin apporté aux moindres détails insuffle dans les choix architecturaux et artistiques de la Basilique sa pensée et sa dévotion au Sacré-Cœur. Pour soutenir la construction de l’église et de la maison, il fonde la Pieuse Œuvre du Sacré-Cœur de Jésus, la dernière des cinq fondations réalisées par Don Bosco au cours de sa vie avec le concours des Salésiens, des Filles de Marie Auxiliatrice, des Coopérateurs Salésiens, et de l’Association des Dévots de Marie Auxiliatrice. Elle a été érigée pour la célébration perpétuelle de six messes quotidiennes dans l’église du Sacré-Cœur à Rome. Tous les inscrits, vivants et défunts, y participent, à travers la prière et les bonnes œuvres accomplies par les Salésiens et les jeunes dans toutes leurs maisons.
            La vision de l’Église qui découle de la fondation de la Pieuse Œuvre est celle d’un « corps vivant », composé de vivants et de défunts en communion entre eux à travers le Sacrifice de Jésus, renouvelé quotidiennement dans la célébration eucharistique au service des jeunes les plus pauvres. Le désir du Cœur de Jésus est que tous soient un (ut unum sint) comme Lui et le Père. La Pieuse Œuvre unit, à travers la prière et les offrandes, les bienfaiteurs vivants et défunts, les Salésiens du monde entier et les jeunes qui vivent dans la maison du Sacré-Cœur. Ce n’est que par la communion, qui a sa source dans l’Eucharistie, que les bienfaiteurs, les Salésiens et les jeunes peuvent contribuer à construire l’Église, à la faire resplendir dans son visage missionnaire. La Pieuse Œuvre a également pour tâche de promouvoir, de diffuser, d’approfondir la dévotion au Sacré-Cœur dans le monde entier et de la renouveler selon les temps et le sentiment de l’Église.

La gare centrale pour évangéliser
            Enfin, l’attention aux jeunes pauvres se manifeste dans la volonté missionnaire d’atteindre les jeunes de Rome à travers le Centre de Jeunes ouvert Via Marsala, juste à la sortie de la gare Termini où passent chaque jour environ 300 000 personnes. Un lieu qui soit une maison pour les nombreux jeunes italiens et étrangers qui visitent Rome ou vivent à Rome et qui ont une soif, parfois inconsciente, de Dieu. De plus, autour de la gare Termini s’amassent depuis toujours des pauvres marqués par la fatigue de la vie. Une autre porte ouverte sur Via Marsala, outre celle du Centre des Jeunes et de la Basilique, exprime le désir de répondre aux besoins de ces personnes avec le Cœur du Christ, car en elles resplendit la gloire de son visage.
            La prophétie de Don Bosco sur la Maison du Sacré-Cœur du 5 avril 1880 accompagne et guide la réalisation de ce qui vient d’être dit :

Don Bosco voyait loin. Notre Mgr Giovanni Marenco rappelait une de ses paroles mystérieuses, que le temps ne devait pas effacer. Le jour même où il accepta cette offre très onéreuse, le Bienheureux lui demanda :
– Sais-tu pourquoi nous avons accepté la maison de Rome ?
– Moi non, répondit celui-ci.
– Eh bien, fais attention. Nous l’avons acceptée parce que, lorsque le Pape sera celui qui n’est pas encore et comme il doit être, nous mettrons dans notre maison la gare centrale pour évangéliser la campagne romaine. Ce sera une œuvre non moins importante que celle d’évangéliser la Patagonie. Alors les Salésiens seront connus et leur gloire resplendira. (MB XIV, 591-592).

don Francesco Marcoccio




Les enfants du cimetière

Le drame des jeunes abandonnés continue de faire du bruit dans le monde contemporain. Les statistiques parlent d’environ 150 millions d’enfants contraints de vivre dans la rue, une réalité qui se manifeste de manière dramatique également à Monrovia, capitale du Libéria. À l’occasion de la fête de Saint Jean Bosco, à Vienne, une campagne de sensibilisation a été organisée par « Jugend Eine Welt », une initiative qui a mis en lumière non seulement la situation locale, mais aussi les difficultés rencontrées dans des pays lointains, comme le Libéria, où le salésien Lothar Wagner consacre sa vie à donner de l’espoir à ces jeunes.

Lothar Wagner : un salésien qui consacre sa vie aux enfants de la rue au Libéria
Lothar Wagner, salésien coopérateur allemand, a consacré plus de vingt ans de sa vie au soutien des enfants en Afrique de l’Ouest. Après avoir acquis une expérience significative au Ghana et en Sierra Leone, il s’est concentré avec passion, ces quatre dernières années, sur le Libéria, un pays marqué par des conflits prolongés, des crises sanitaires et des dévastations telles que l’épidémie d’Ebola. Lothar s’est fait le porte-parole d’une réalité souvent ignorée, où les cicatrices sociales et économiques compromettent les opportunités de croissance pour les jeunes.

Le Libéria, avec une population de 5,4 millions d’habitants, est un pays où la pauvreté extrême s’accompagne d’institutions fragiles et d’une corruption généralisée. Les conséquences de décennies de conflits armés et de crises sanitaires ont laissé le système éducatif parmi les pires au monde, tandis que le tissu social s’est effrité sous le poids des difficultés économiques et du manque de services essentiels. De nombreuses familles ne parviennent pas à garantir à leurs enfants les besoins primaires, poussant ainsi un grand nombre de jeunes à chercher refuge dans la rue.

En particulier, à Monrovia, certains enfants trouvent refuge dans les endroits les plus inattendus : les cimetières de la ville. Connus sous le nom d' »enfants du cimetière », ces jeunes, dépourvus de logement sûr, se réfugient parmi les tombes, un lieu qui devient le symbole d’un abandon total. Dormir dehors, dans les parcs, dans les décharges, voire dans les égouts ou à l’intérieur de tombes, est devenu le tragique refuge quotidien pour ceux qui n’ont pas d’autre choix.

« C’est vraiment très émouvant quand on se promène dans le cimetière et qu’on voit des enfants sortir des tombes. Ils se couchent parmi les morts parce qu’ils n’ont plus de place dans la société. Une telle situation est scandaleuse. »

Une approche multiple : du cimetière aux cellules de détention
Les enfants des cimetières ne sont pas les seuls à retenir l’attention de Lothar. Le salésien se consacre également à une autre réalité dramatique : celle des mineurs détenus dans les prisons libériennes. La prison de Monrovia, construite pour 325 détenus, accueille aujourd’hui plus de 1 500 prisonniers, dont de nombreux jeunes incarcérés sans accusation formelle. Les cellules, extrêmement surpeuplées, sont un clair exemple de la manière dont la dignité humaine est souvent sacrifiée.

« Il manque la nourriture, l’eau potable, les normes d’hygiène, l’assistance médicale et psychologique. La faim constante et le manque dramatique d’espace dû à la surpopulation affaiblissent énormément la santé des enfants. Dans une petite cellule, conçue pour deux détenus, sont enfermés huit à dix jeunes. Ils dorment à tour de rôle, car les dimensions de la cellule n’offrent de la place qu’aux nombreux occupants debout ».

Pour faire face à cette situation, il organise des visites quotidiennes dans la prison, apportant de l’eau potable, des repas chauds et un soutien psychosocial qui devient une bouée de sauvetage. Sa présence constante est fondamentale pour tenter de rétablir un dialogue avec les autorités et les familles, sensibilisant également à l’importance de protéger les droits des mineurs, souvent oubliés et abandonnés à un destin funeste. « Nous ne les laissons pas seuls dans leur solitude, mais nous essayons de leur donner un espoir », souligne Lothar avec la fermeté de celui qui connaît la souffrance quotidienne de ces jeunes vies.

Une journée de sensibilisation à Vienne
Le soutien à ces initiatives passe également par l’attention internationale. Le 31 janvier, à Vienne, Jugend Eine Welt a organisé une journée dédiée à la mise en évidence de la situation précaire des enfants de la rue, non seulement au Libéria, mais dans le monde entier. Au cours de l’événement, Lothar Wagner a partagé ses expériences avec des étudiants et des participants, les impliquant dans des activités pratiques – comme l’utilisation d’un ruban de signalisation pour simuler les conditions d’une cellule surpeuplée – afin de leur faire comprendre en première personne les difficultés et l’angoisse des jeunes qui vivent quotidiennement dans un espace minimum et dans des conditions dégradantes.

Au-delà des urgences quotidiennes, le travail de Lothar et de ses collaborateurs se concentre également sur des interventions à long terme. Les missionnaires salésiens sont en effet engagés dans des programmes de réhabilitation qui vont du soutien éducatif à la formation professionnelle pour les jeunes détenus, en passant par l’assistance juridique et spirituelle. Ces interventions visent à réintégrer dans la société les jeunes une fois libérés, en les aidant à construire un avenir digne et plein de possibilités. L’objectif est clair : offrir non seulement une aide immédiate, mais créer un parcours qui permette aux jeunes de développer leur potentiel et de contribuer activement à la renaissance du pays.

Les initiatives s’étendent également à la construction de centres de formation professionnelle, d’écoles et de structures d’accueil, dans l’espoir d’élargir le nombre de jeunes bénéficiaires et de garantir un soutien constant, jour et nuit. Le témoignage du succès de nombreux anciens « enfants du cimetière » – dont certains sont devenus enseignants, médecins, avocats et entrepreneurs – est la confirmation tangible qu’avec un bon soutien, la transformation est possible.

Malgré l’engagement et le dévouement, le parcours est parsemé d’obstacles : la bureaucratie, la corruption, la méfiance des enfants et le manque de ressources représentent des défis quotidiens. De nombreux jeunes, marqués par des abus et l’exploitation, ont du mal à faire confiance aux adultes, ce qui rend encore plus ardue la tâche d’instaurer une relation de confiance et d’offrir un soutien réel et durable. Cependant, chaque petit succès – chaque jeune qui retrouve l’espoir et commence à construire un avenir – confirme l’importance de ce travail humanitaire.

Le parcours entrepris par Lothar et ses collaborateurs témoigne que, malgré les difficultés, il est possible de faire la différence dans la vie des enfants abandonnés. La vision d’un Libéria dans lequel chaque jeune puisse réaliser son potentiel se traduit en actions concrètes, de la sensibilisation internationale à la réhabilitation des détenus, en passant par les programmes éducatifs et les projets d’accueil. Le travail, empreint d’amour, de solidarité et d’une présence constante, représente un phare d’espoir dans un contexte où le désespoir semble prévaloir.

Dans un monde marqué par l’abandon et la pauvreté, les histoires de renaissance des enfants des rues et des jeunes détenus sont une invitation à croire qu’avec un bon soutien, chaque vie peut renaître. Lothar Wagner continue de se battre pour garantir à ces jeunes non seulement un abri, mais aussi la possibilité de réécrire leur destin, démontrant que la solidarité peut vraiment changer le monde.




L’histoire des missions salésiennes (1/5)

Le 150e anniversaire des missions salésiennes se tiendra le 11 novembre 2025. Nous pensons qu’il est intéressant de raconter à nos lecteurs une brève histoire des précédents et des premières étapes de ce qui allait devenir une sorte d’épopée missionnaire salésienne en Patagonie. Nous le faisons en cinq épisodes, avec l’aide de sources inédites qui nous permettent de corriger les nombreuses inexactitudes qui sont passées dans l’histoire.

            Dégageons tout de suite le terrain : on dit et on écrit que Don Bosco voulait partir en mission aussi bien comme séminariste que comme jeune prêtre. Ceci n’est pas documenté. Si, en tant qu’étudiant de 17 ans (1834), il a demandé à rejoindre les frères réformés franciscains du couvent des Anges à Chieri qui avaient des missions, la demande a apparemment été faite principalement pour des raisons financières. Si dix ans plus tard (1844), en quittant le « Pensionnat ecclésiastique » de Turin, il est tenté d’entrer dans la Congrégation des Oblats de la Vierge Marie, qui venait d’être chargée de missions en Birmanie (Myanmar), il est cependant vrai que la mission, pour laquelle il a peut-être aussi entrepris l’étude des langues étrangères, n’était pour le jeune prêtre Bosco qu’une des possibilités d’apostolat qui s’ouvraient à lui. Dans les deux cas, Don Bosco suivit immédiatement le conseil du Père Comollo d’entrer au séminaire diocésain et, plus tard, celui du Père Cafasso de continuer à se consacrer aux jeunes de Turin. Même dans les vingt années qui vont de 1850 à 1870, occupé à planifier la continuité de son « œuvre des Oratoires », à donner une base juridique à la société salésienne qu’il était en train de constituer, à la formation spirituelle et pédagogique des premiers salésiens, tous jeunes de son Oratoire, il n’était certainement pas en mesure de donner suite à ses aspirations missionnaires personnelles ou à celles de ses « fils » eux-mêmes. Il n’y a même pas une ombre de lui ou des salésiens allant en Patagonie, même si c’est écrit sur le papier ou sur le web.

Une sensibilité missionnaire accrue
            Cela n’enlève rien au fait que la sensibilité missionnaire de Don Bosco, probablement réduite à de faibles indices et à de vagues aspirations dans les années de sa formation sacerdotale et de son premier sacerdoce, s’est considérablement aiguisée au fil des ans. La lecture des Annales de la Propagation de la Foi lui fournit de bonnes informations sur le monde missionnaire, à tel point qu’il en a tiré des épisodes pour certains de ses livres et qu’il a fait l’éloge du Pape Grégoire XVI qui encourageait la diffusion de l’Évangile aux quatre coins du monde et approuvait de nouveaux Ordres religieux à finalité missionnaire. Don Bosco a pu bénéficier de l’influence considérable du chanoine G. Ortalda, directeur du Conseil diocésain de l’Association Propaganda Fide pendant 30 ans (1851-1880) et promoteur des « Ecoles Apostoliques » (sorte de petit séminaire pour les vocations missionnaires). En décembre 1857, il avait également lancé le projet d’une exposition en faveur des missions catholiques confiées aux six cents missionnaires sardes. Don Bosco en était bien informé.
            L’intérêt missionnaire grandit en lui en 1862 lors de la canonisation solennelle à Rome des 26 protomartyrs japonais et en 1867 à l’occasion de la béatification de plus de deux cents martyrs japonais, célébrée elle aussi avec solennité au Valdocco. Dans la ville papale, pendant ses longs séjours en 1867, 1869 et 1870, il a pu voir d’autres initiatives missionnaires locales, comme la fondation du Séminaire pontifical des Saints Apôtres Pierre et Paul pour les missions à l’étranger.
            Le Piémont, avec près de 50% des missionnaires italiens (1500 avec 39 évêques), était à l’avant-garde dans ce domaine et le franciscain Monseigneur Luigi Celestino Spelta, vicaire apostolique de Hupei, se rendit à Turin en novembre 1859. Il ne visita pas l’Oratoire, ce que fit par contre Don Daniele Comboni en décembre 1864, qui publia à Turin son Plan de Régénération pour l’Afrique avec le projet intrigant d’évangéliser l’Afrique à travers les Africains.
            Don Bosco eut un échange d’idées avec lui, qui en 1869 essaya, sans succès, de l’associer à son projet et l’année suivante l’invita à envoyer quelques prêtres et laïcs pour diriger un institut au Caire et le préparer ainsi aux missions en Afrique, au centre desquelles il comptait confier aux salésiens un vicariat apostolique. Au Valdocco, la demande, qui n’est pas accordée, est remplacée par la volonté d’accueillir des garçons à éduquer pour les missions. Là, cependant, le groupe d’Algériens recommandé par Monseigneur Charles Martial Lavigerie rencontra des difficultés et fut envoyé à Nice Maritime, en France. En 1869, la demande du même archevêque d’avoir des auxiliaires salésiens dans un orphelinat d’Alger dans un moment d’urgence n’a pas été acceptée. De même, la demande du missionnaire brescien Giovanni Bettazzi d’envoyer des salésiens pour diriger un institut d’art et d’artisanat en plein essor, ainsi qu’un petit séminaire, dans le diocèse de Savannah (Géorgie, USA) était suspendue à partir de 1868. Les propositions des autres, qu’il s’agisse de diriger des œuvres éducatives dans les « territoires de mission » ou d’agir directement in partibus infidelium, pouvaient également être attrayantes, mais Don Bosco ne renoncerait jamais ni à sa pleine liberté d’action – qu’il voyait peut-être compromise par les propositions qu’il avait reçues des autres – ni surtout à son travail particulier auprès des jeunes, pour lesquels il était à l’époque très occupé à développer la société salésienne nouvellement approuvée (1869) au-delà des frontières de Turin et du Piémont. Bref, jusqu’en 1870, Don Bosco, bien que théoriquement sensible aux besoins missionnaires, cultive d’autres projets au niveau national.

Quatre années de demandes non satisfaites (1870-1874)
            Le thème missionnaire et les questions importantes qui s’y rapportent font l’objet d’une attention particulière lors du Concile Vatican I (1868-1870). Si le document Super Missionibus Catholicis ne fut jamais présenté à l’assemblée générale, la présence à Rome de 180 évêques provenant de  » terres de mission  » et l’information positive sur le modèle salésien de vie religieuse, diffusée parmi eux par quelques évêques piémontais, donnèrent à Don Bosco l’occasion de rencontrer beaucoup d’entre eux et d’être contacté par eux, aussi bien à Rome qu’à Turin.
            C’est là que fut reçue, le 17 novembre 1869, la délégation chilienne composée de l’archevêque de Santiago et de l’évêque de Concepción. En 1870, c’est au tour de Mgr D. Barbero, vicaire apostolique à Hyderabad (Inde), déjà connu de Don Bosco, de solliciter des soeurs disponibles pour l’Inde. En juillet 1870, le dominicain Mgr G. Sadoc Alemany, archevêque de San Francisco en Californie (USA), se rendit au Valdocco et demanda et obtint des salésiens un hospice avec une école professionnelle (qui ne fut jamais construite). Le franciscain Mgr L. Moccagatta, Vicaire Apostolique de Shantung (Chine) et son confrère Mgr Eligio Cosi, plus tard son successeur, visitèrent également le Valdocco. En 1873, c’est au tour de Mgr T. Raimondi de Milan d’offrir à Don Bosco la possibilité d’aller diriger les écoles catholiques dans la Préfecture Apostolique de Hong Kong. Les négociations, qui durèrent plus d’un an, s’arrêtèrent pour diverses raisons, tout comme, en 1874, un projet de nouveau séminaire du Père Bertazzi pour Savannah (USA) resta également sur le papier. Il en fut de même pour les fondations missionnaires en Australie et en Inde, pour lesquelles Don Bosco entama des négociations avec des évêques individuels, qu’il donna parfois comme conclues au Saint-Siège, alors qu’il ne s’agissait en réalité que de projets en cours de réalisation.
            Au début des années soixante-dix, avec un personnel composé d’un peu plus de deux douzaines de personnes (prêtres, clercs et coadjuteurs), dont un tiers de vœux temporaires, réparties dans six maisons, il aurait été difficile pour Don Bosco d’envoyer certains d’entre eux en terre de mission. D’autant plus que les missions étrangères qui lui étaient proposées jusqu’alors en dehors de l’Europe présentaient de sérieuses difficultés de langue, de culture et de traditions non autochtones, et que la tentative de longue date de disposer de jeunes anglophones, même avec l’aide du recteur du collège irlandais de Rome, Mgr Toby Kirby, s’était soldée par un échec.

(suite)

Photo d’époque : le port de Gênes, 14 novembre 1877.




Projet Missionnaire Basilicate – Calabre

Dans le cadre du « Projet Europe », l’Italie du Sud a lancé un nouveau projet missionnaire dans les régions de la Calabre et de la Basilicate en accueillant les premiers missionnaires « ad gentes », signe de générosité missionnaire et d’opportunité de croissance dans l’ouverture mondiale du charisme de Don Bosco.

L’Europe comme terre de mission : dans une nouvelle perspective missiologique salésienne, les missions prennent de moins en moins une connotation géographique, comme un mouvement vers « les terres de mission ». Aujourd’hui les missionnaires viennent des cinq continents et sont envoyés vers les cinq continents. Ce mouvement missionnaire multidirectionnel se produit déjà dans de nombreux diocèses et congrégations. Avec le « Projet Europe », les salésiens se sont confrontés à ce changement de paradigme missionnaire, pour lequel un chemin de conversion de l’esprit et du cœur est nécessaire. Le « Projet Europe », dans l’idée de Don Pascual Chávez, est un acte de courage apostolique et une opportunité de renaissance charismatique sur le continent européen à insérer dans le contexte plus large de la nouvelle évangélisation. L’objectif est d’engager toute la congrégation salésienne dans le renforcement du charisme salésien en Europe, surtout par un profond renouvellement spirituel et pastoral des confrères et des communautés, afin de continuer le projet de Don Bosco en faveur des jeunes, en particulier les plus pauvres.

Les provinces salésiennes sont appelées à repenser leurs présences salésiennes en vue d’une évangélisation plus efficace qui réponde au contexte actuel. Parmi elles, la province d’Italie Méridionale a élaboré un nouveau projet missionnaire qui concerne les régions de la Basilicate et de la Campanie. En partant d’une analyse du territoire, on peut constater que le Sud de l’Italie est caractérisé par une présence assez consistante de jeunes, une dénatalité moindre par rapport à d’autres régions italiennes, et une émigration très présente qui fait que de nombreux jeunes s’en vont pour étudier ou travailler ailleurs. Les traditions religieuses et familiales, qui ont toujours constitué un repère identitaire important pour la communauté, sont moins pertinentes qu’auparavant et de nombreux jeunes vivent la foi comme une réalité distante de leur vie, sans pour autant se montrer totalement opposés à celle-ci. Les Salésiens expérimentent une bonne adhésion aux expériences spirituelles des jeunes mais, en même temps, une faible réceptivité à des parcours systématiques et à des propositions de vie définitives. Parmi les autres problématiques touchant le monde des jeunes il y a l’analphabétisme émotionnel et affectif, les crises relationnelles des familles, le décrochage scolaire et le chômage. Tout cela alimente des phénomènes de pauvreté diffuse et la croissance d’organisations criminelles qui trouvent un terreau fertile pour y impliquer et détourner les jeunes. Dans ce contexte, de nombreux jeunes expriment un fort désir d’engagement social, en particulier dans les domaines politique et écologique et dans le monde du bénévolat.

La province salésienne a réfléchi ces dernières années sur la manière d’agir pour être pertinente sur le territoire et a fait plusieurs choix importants, parmi lesquels le développement des œuvres et des projets pour les jeunes les plus pauvres comme les maisons-familles et les centres de jour qui manifestent directement et clairement le choix en faveur des jeunes à risque. La prise en charge intégrale des jeunes doit viser à une formation intégrale, et pas seulement théorique, afin que le jeune puisse découvrir ou prendre conscience de ses propres capacités. De plus, une pratique missionnaire plus courageuse est requise pour réaliser des parcours d’éducation à la foi qui aident les jeunes à réaliser leur vocation chrétienne. Tout cela doit être réalisé avec l’engagement actif de tous : consacrés, laïcs, jeunes, familles, membres de la famille salésienne… dans un style pleinement synodal qui promeut la coresponsabilité et la participation.

La Basilicate et la Calabre ont été choisies comme des zones charismatiquement significatives et nécessitant un renforcement et un nouvel élan éducatif et pastoral. Il s’agit de territoires sur lesquels il faut parier en ouvrant de nouvelles frontières pastorales et en redimensionnant certaines déjà présentes. Les présences salésiennes sont au nombre de six : Potenza, Bova Marina, Corigliano Rossano, Locri, Soverato et Vibo Valentia. Quels sont les salésiens requis pour ce projet missionnaire ? Des salésiens disposés à travailler dans des contextes pauvres, populaires et peuplés, avec des difficultés économiques et parfois un manque de stimuli culturels, et attentifs en particulier à la première annonce. Des salésiens qui soient bien préparés, sur le plan spirituel, salésien, culturel et charismatique. Il est nécessaire d’avoir bien présent à l’esprit le motif pour lequel ce projet a été élaboré. Il s’agit de prendre soin de la Basilicate et de la Calabre, deux régions pauvres et avec peu de propositions pastorales systématiques en faveur des jeunes les plus nécessiteux, et où la première annonce devient de plus en plus une exigence, même dans des contextes de tradition catholique. Le travail éducatif-pastoral des salésiens cherche à donner de l’espoir à de nombreux jeunes qui sont souvent contraints de quitter leur famille pour se déplacer vers le Nord à la recherche d’une vie meilleure. Pour affronter cette réalité avec des offres pastorales et formatrices visionnaires, telles que la formation professionnelle et l’attention à la détresse juvénile, il devient de plus en plus urgent de travailler avec les institutions pour trouver des réponses. Aux côtés des salésiens consacrés, il y a sur ce territoire une bonne présence de laïcs et de membres de la Famille Salésienne. L’Église locale, tout comme la réalité sociale, nourrit un grand respect et une grande considération pour les fils de Don Bosco.

L’accueil de nouveaux missionnaires ad gentes est une bénédiction et un défi qui s’inscrivent dans ce projet pastoral. La province d’Italie Méridionale (IME) a reçu cette année quatre missionnaires envoyés lors de la 155e expédition missionnaire salésienne. Parmi eux, deux sont devenus membres de la nouvelle délégation provinciale AKM (Albanie, Kosovo, Monténégro), les deux autres ont été destinés au Sud de l’Italie et participeront au nouveau projet missionnaire de l’IME pour la Basilicate et la Campanie : Henri Mufele Ngankwini et Guy Roger Mutombo, de la République Démocratique du Congo (Province ACC). Pour accompagner au mieux les missionnaires qui arrivent, la Province IME veut faire en sorte qu’ils se sentent chez eux et aient une insertion progressive dans la nouvelle réalité communautaire et sociale. Les missionnaires sont progressivement intégrés dans l’histoire et la culture du lieu qui deviendra pour eux leur maison et, dès les premiers jours, ils suivent des cours de langue et de culture italiennes, pour une durée d’au moins deux ans, en vue d’une pleine inculturation. Parallèlement, ils sont introduits dans les processus de formation et font leurs premiers pas dans l’action éducative et pastorale de la Province avec les jeunes et les adolescents. Une dimension fondamentale est l’attention au chemin spirituel personnel : à chaque missionnaire sont garantis des moments adéquats de prière personnelle et communautaire, l’accompagnement et la direction spirituelle, la confession, si possible dans une langue qu’ils comprennent, et des temps de mise à jour et de formation. Par la suite, le missionnaire bénéficiera d’une formation continue pour une insertion encore plus complète dans les dynamiques de la Province, avec quelques points d’attention spécifiques. L’expérience missionnaire sera évaluée périodiquement pour identifier les points forts, les fragilités et les éventuels correctifs, dans un esprit fraternel.

Comme nous le rappelle Don Alfred Maravilla, Conseiller Général pour les Missions, « être missionnaires dans une Europe sécularisée pose d’importants défis internes et externes. La bonne volonté ne suffit pas. » « En regardant en arrière avec les yeux de la foi, nous réalisons qu’à travers le lancement du Projet Europe, l’Esprit préparait la Société Salésienne à affronter la nouvelle réalité de l’Europe, afin de pouvoir être plus conscients de nos ressources et aussi des défis, et avec l’espoir de relancer le charisme salésien sur le Continent. » Prions pour que dans les régions de Basilicate et de Calabre, la présence salésienne soit inspirée par l’Esprit pour le bien des jeunes les plus nécessiteux.

Marco Fulgaro