Temps de lecture : 10 min.
Don Bosco aimait-il les animaux ? Sont-ils présents dans sa vie ? Et quelle relation entretenait-il avec eux ? Quelques questions auxquelles on tente de répondre.
Oiseaux, chiens, chevaux, etc.
Dans l’étable de la petite maison où Maman Marguerite s’était installée avec ses enfants et sa belle-mère après la mort inattendue de son mari François, il y avait une vachette, un veau et un âne. Dans un coin de la maison, un poulailler.
Dès qu’il le put, Giovanni emmenait la vache au pâturage, mais il était plus intéressé par les nids d’oiseaux. Il le rappelle lui-même dans ses « Mémoires » : « J’étais très habile à piéger les oiseaux avec la cage, le gui, les ficelles, et je connaissais très bien les nids d’oiseaux » (MO 30).
Les différents incidents de son « métier » sont bien connus. On se souvient de la fois où son bras s’est coincé dans la fente d’un tronc d’arbre, où il avait découvert un nid de mésanges ; ou de cette autre fois où il a vu un coucou massacrer une nichée de rossignols. Une autre fois, il vit sa pie mourir de gourmandise après avoir avalé trop de cerises, y compris les noyaux. Un jour, pour atteindre une nichée trouvée sur un vieux chêne, il glissa et tomba lourdement sur le sol. Et un triste jour, en rentrant de l’école, il trouva son merle préféré, élevé en cage et entraîné à gazouiller des mélodies, tué par le chat.
En ce qui concerne les gallinacés, on se souvient de l’histoire de la mystérieuse poule trouvée sous le tamis dans la maison de ses grands-parents à Capriglio et libérée par Giovanni avec des rires de soulagement. De ces années date également l’incident de la dinde volée par un voyou et restituée avec courage et un brin d’imprudence enfantine. Des années de Chieri date l’astuce du poulet en gelée apporté à table et qui sort vivant de la marmite avec des cris aigus.
À Sussambrino, Giovanni se lie d’une véritable amitié avec un chien, le chien de chasse de son frère Giuseppe. Il lui apprit à attraper les morceaux de pain à la volée et à les manger seulement lorsqu’on le lui ordonnait. Il lui apprit à monter et à descendre l’échelle de la grange, à faire des sauts et des tours de cirque. Le chien le suivait partout et lorsque Giovanni l’offrit à des parents de Moncucco, la pauvre bête, prise de nostalgie, revint seule à la maison à la recherche de son ami perdu.
Étudiant à Castelnuovo, Giovanni apprit également à monter à cheval. Au cours de l’été 1832, le prévôt Don Dassano, qui lui faisait répéter ses leçons, lui confia la garde de l’écurie. Giovanni devait mener le cheval en promenade et, une fois sorti du village, il sautait sur son dos et le faisait galoper.
Jeune prêtre à peine ordonné, invité à prêcher à Lauriano, à une trentaine de kilomètres de Castelnuovo, il partit à cheval. Mais la chevauchée se termina mal. Sur la colline de Berzano, la bête, effrayée par une grande volée d’oiseaux, se cabra et le cavalier se retrouva à terre.
Don Bosco fit encore beaucoup d’autres chevauchées au cours de ses déplacements dans le Piémont et des excursions avec les garçons. Il suffit de rappeler l’ascension triomphale de Superga, au printemps 1846, sur un cheval harnaché selon les règles de l’art, que lui avait envoyé à Sassi Don Anselmetti.
Beaucoup moins triomphale fut la traversée des Apennins sur le dos d’un âne lors du voyage vers Salicetto Langhe en novembre 1857. Le sentier était étroit et escarpé, la neige abondante. L’animal trébuchait et tombait à chaque tournant et Don Bosco fut obligé de descendre et de le pousser en avant. La descente fut encore plus aventureuse et seul le Seigneur sait comment il put atteindre le village à temps pour son ministère.
Ce ne fut pas le dernier voyage de Don Bosco sur un âne. En juillet 1862, il parcourut de la même manière les six kilomètres qui séparent Lanzo de Sant’Ignazio. Et il en fut probablement de même à d’autres occasions.
Mais l’une des chevauchées les plus glorieuses de Don Bosco fut celle qui, en octobre 1864, le conduisit de Gavi à Mornèse. Il arriva au village tard dans la soirée, au son festif des cloches. Les gens sortaient de leurs maisons, avec les lampes allumées, et s’agenouillaient sur son passage pour lui demander une bénédiction. C’était l’hosanna du peuple au saint de la jeunesse.
Les animaux dans les rêves de Don Bosco
Si l’on considère maintenant les rêves de Don Bosco, on y trouve une grande variété d’animaux domestiques et sauvages, paisibles et féroces, représentant les jeunes, leurs vertus et leurs défauts, le diable et ses flatteries, le monde et ses passions.
Dans le rêve de 9 ans, lorsque les garçons eurent disparu, Giovannino vit une multitude de chevreaux, chiens, chats, ours et autres animaux qui se transformèrent ensuite en doux agneaux. Dans celui de 16 ans, la Dame majestueuse lui confia un troupeau ; dans celui de 22 ans, il vit à nouveau les jeunes transformés en agneaux ; et enfin dans celui de 1844, les agneaux se transformèrent en bergers !
En 1861, Don Bosco fit le rêve d’une promenade au Paradis. Au cours de ce voyage, les jeunes qui l’accompagnaient se trouvèrent face à des lacs à traverser. L’un d’eux était peuplé de bêtes féroces prêtes à dévorer quiconque tenterait de le traverser.
La veille de la fête de l’Assomption en 1862, il rêva qu’il se trouvait aux Becchi avec tous ses jeunes, lorsqu’un énorme serpent de 7 à 8 mètres de long apparut dans la prairie, provoquant l’horreur. Mais un guide lui apprit à l’attraper avec une corde, qui se changera par la suite en chapelet.
Le 6 janvier 1863, Don Bosco raconta aux garçons le fameux rêve de l’éléphant apparu dans la cour du Valdocco. Il était d’une taille immense et amusait gentiment les garçons. Il les suivit dans l’église, mais s’agenouilla dans la direction opposée, le museau tourné vers l’entrée. Puis il sortit à nouveau dans la cour et, soudain, il changea d’humeur et, avec des barrissements effrayants, il se jeta sur les jeunes pour les mettre en pièces. C’est alors que la petite statue de la Vierge, que l’on voit encore aujourd’hui sous le portique, s’anima et ouvrit son manteau pour protéger et sauver ceux qui se réfugiaient auprès d’elle.
En 1864, Don Bosco fait le rêve des corbeaux survolant la cour du Valdocco pour becqueter les garçons. En 1865, c’est au tour d’une perdrix et d’une caille, symboles respectifs de la vertu et du vice. Puis vint le rêve de l’aigle majestueux descendant pour s’emparer d’un garçon de l’Oratoire ; et encore celui du gros chat aux yeux de feu.
En 1867, il sembla à Don Bosco qu’un énorme crapaud dégoûtant, le diable, entrait dans sa chambre. En 1872, il raconta le rêve du rossignol. En 1876, celui des poules, celui du taureau furieux, et aussi celui de la charrette tirée par un cochon et un énorme crapaud.
En 1878, il voit en rêve un chat poursuivi par deux méchants chiens. Et ainsi de suite.
Laissant aux experts le soin de discuter ces rêves, nous savons cependant qu’ils ont eu une grande fonction pédagogique dans les maisons de Don Bosco et que, surtout dans certains d’entre eux, il est difficile de ne pas voir une intervention spéciale de Dieu.
Le chien gris
Mais si nous voulons arriver au seuil du mystère, nous devons nous souvenir du « Grigio », ce chien mystérieux qui est apparu tant de fois pour protéger Don Bosco à des moments où sa vie était en danger.
Dans ses « Mémoires », Don Bosco lui-même écrit à son sujet : « Le chien gris a fait l’objet de nombreuses discussions et de diverses suppositions. Beaucoup d’entre vous l’ont vu et l’ont même caressé. Laissant de côté les histoires étranges que l’on raconte sur ce chien, je vais vous présenter ce qui est la pure vérité » (MO 251). Il poursuit en racontant les risques qu’il courait dans les années 1950 en rentrant au Valdocco tard le soir et comment ce gros chien apparaissait souvent à l’improviste à ses côtés et l’accompagnait jusqu’à la maison.
Il raconte, par exemple, cette soirée de novembre 1854 où, dans la rue qui mène de la Consolata au Cottolengo (aujourd’hui Via Consolata et Via Ariosto, perpendiculaire au Corso Regina), il aperçut deux rôdeurs qui le suivaient et se jetèrent sur lui pour l’étrangler, lorsque le chien apparut, les attaqua avec rage et les obligea à s’enfuir précipitamment. Enfin, dernière occasion, il raconte que le Gris lui est apparu une nuit sur la route de Morialdo à Moncucco, alors qu’il se rendait, seul, à la ferme Moglia pour rendre visite à ses vieux amis.
Mais ses « Mémoires », écrits dans les années 1873-75, n’ont pas pu mentionner ce qui semble bien être la dernière apparition du Gris, qui eut lieu dans la nuit du 13 février 1883. N’ayant pas trouvé de voiture, Don Bosco se rendait à pied, de Vintimille à la nouvelle maison salésienne de Vallecrosia sous une pluie battante, ne sachant où poser les pieds en raison de sa faible vue, quand son vieil ami, le fidèle Grigio, qu’il n’avait pas vu depuis plusieurs années, vint à sa rencontre. Le chien l’aborda en lui faisant fête, puis il lui servit de guide en allant devant lui dans la boue et l’obscurité épaisse. Arrivé à Vallecrosia, et après avoir salué Don Bosco de la patte, il disparut (MB XVI, 35-36).
Au cours d’un déjeuner à Marseille dans la famille Olive, Don Bosco raconta le fait. Madame Olive lui demanda alors comment une telle apparition était possible, car le chien aurait déjà dû être trop vieux. Don Bosco lui répondit en souriant : « C’était sans doute son fils ou un petit-fils de celui-là ! » (MB XVI, 36-37). Il éluda ainsi une question embarrassante, car il ne pouvait s’agir d’un phénomène naturel, mais il ne dit pas qu’il s’agissait d’un produit de son imagination. Il était trop sincère pour cela.
Selon les témoignages de Giuseppe Buzzetti, Carlo Tomatis et Giuseppe Brosio, qui ont vécu avec Don Bosco dès les débuts, le Grigio ressemblait à un chien de troupeau ou à un chien de garde. Personne, pas même Don Bosco, n’a jamais su d’où il venait ni qui était son maître. Carlo Tomatis en dit plus : « C’était un chien à l’aspect vraiment redoutable et parfois Maman Marguerite, en le voyant, s’exclamait : « Oh ! quelle vilaine bête ! » Il ressemblait presque à un loup, avec un museau allongé, des oreilles retroussées, le poil gris, haut d’un mètre » (MB IV, 712). Ce n’est pas pour rien qu’il inspirait la crainte à ceux qui ne le connaissaient pas. Pourtant, le cardinal Cagliero témoignera : « J’ai vu la chère bête un soir d’hiver » (MB IV, 716).
Chère bête !!! pour les amis !…
Une fois, au lieu de raccompagner Don Bosco, il l’empêcha de sortir. Il était tard dans la soirée et Maman Marguerite essayait de dissuader son fils de sortir, mais il était déterminé et pensait à se faire accompagner par des garçons plus âgés. À la porte de la maison, ils trouvèrent le chien couché. « Oh, le Gris, dit Don Bosco, lève-toi et viens ! Mais le chien, au lieu d’obéir, poussa un hurlement de peur et ne bougea pas. Deux fois Don Bosco essaya de passer et deux fois le Gris l’empêcha de passer. C’est alors que Maman Marguerite intervient : « Se ‘t veule nen scoteme me, scota almeno ‘l can, seurt nen » (Si tu ne veux pas m’écouter, écoute au moins le chien, ne sors pas). Et le chien eut le dessus. On apprendra plus tard que des tueurs à gages l’attendaient dehors pour lui ôter la vie (MB IV, 714).
Le Grigio a donc souvent sauvé la vie de Don Bosco. Mais il n’acceptait jamais de nourriture ni aucune autre forme de récompense. Il apparaissait soudainement et disparaissait sans laisser de traces une fois la mission accomplie.
Mais alors, quel genre de chien était le Gris ? Un jour de 1872, Don Bosco est l’invité des barons Ricci dans leur maison de campagne à la Madonna dell’Olmo, près de Cuneo. La baronne Azeglia Fassati, épouse du baron Carlo, aborda le sujet du Gris mais Don Bosco dit : « Laissons le Grigio tranquille, il y a déjà quelque temps que je ne l’ai pas vu ». Cela faisait deux ans, parce qu’en 1870 il avait dit : « Ce chien est vraiment un cas dans ma vie ! Dire que c’est un ange ferait rire ; mais on ne peut pas dire non plus que c’est un chien ordinaire, car je l’ai vu encore l’autre jour » (MB X, 386). Était-ce à l’occasion de son voyage à Moncucco ?
Mais à une autre occasion, il affirmera ceci : « De temps en temps, il me venait à l’esprit de chercher l’origine de ce chien… Ce que je sais, c’est que cet animal a été pour moi une véritable providence » (MB IV, 718).
Comme le chien de saint Roch ! Certains phénomènes passent à travers les mailles du filet de la recherche scientifique. Pour ceux qui croient, aucune explication n’est nécessaire ; pour ceux qui ne croient pas, aucune explication n’est possible.